La Terrasse

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Focus -283-Festival Odyssées en Yvelines

Portrait chinois de Karim Messaoudi, celui d’un bonhomme qui ne sait pas se tenir

Portrait chinois de Karim Messaoudi, celui d’un bonhomme qui ne sait pas se tenir - Critique sortie Théâtre
© DR Karim Messaoudi

Conception Karim Messaoudi / à partir de 9 ans

Publié le 16 décembre 2019 - N° 283

Avec la création de Karim Messaoudi, Odyssées en Yvelines propose à ses jeunes spectateurs une virée du côté du nouveau cirque. Un portrait acrobatique plein de vie, jusqu’à la démesure.

En alternance avec l’acrobate Thibault Brignier, vous incarnez dans Portrait chinois un personnage désigné par un seul « K ». Lettre qui fait aussi office de titre de votre précédente création, réalisée avec le groupe Kurz Davor. Quel est le lien entre ces deux spectacles ?

Karim Messaoudi : Lorsque le Théâtre de Sartrouville m’a proposé de créer une pièce pour son festival Odyssées en Yvelines, j’étais en plein travail avec Kurz Davor. J’avais la sensation de ne pas avoir tout dit de K, et de pouvoir encore creuser cette figure. Car plus qu’un personnage, K est une figure définie par ses gestes, par ses actions souvent démesurées. Dans Portrait chinois, je la prends à un autre moment de sa vie, plus tôt. Cette pièce raconte la construction d’un bonhomme en marge.

En quoi le cirque est-il selon vous adapté à l’expression de la marginalité ?

K.M. : Je crois que grâce à son expressivité physique, le cirque peut représenter ce qui se passe dans le corps de nombreuses personnes en marge de la société. Dans Portrait chinois, Thibault Brignier ou moi donnons à voir un être traversé par des désirs plus grands que lui. Pour faire écho à l’imaginaire des jeunes à qui je m’adresse, je me suis nourri entre autres des comportements d’un personnage de manga : Naruto, une espèce de ninja cancre. L’univers de Miyazaki, réalisateur japonais de films d’animation, m’a aussi beaucoup inspiré pour mon rapport aux objets, qui ont souvent une vie « extra-normale ».

Cela grâce au plateau rond rotatif qui vous tient lieu de piste.

K.M. : En effet. Déjà présent dans K, ce dispositif de deux mètres de diamètre permet de créer de nombreuses situations de jeu. Il m’aide à donner corps à ce bonhomme qui ne sait pas vraiment se tenir, ni s’ancrer dans une réalité. Avec ses deux mètres de diamètre, il permet aussi de répondre aux contraintes de format imposées par Odyssées en Yvelines. Avec ce plateau, Portrait chinois peut se déplacer partout.

« Cette pièce raconte la construction d’un bonhomme en marge. »

Vous signez avec Portrait chinois votre premier spectacle jeune public. En quoi cela a-t-il déplacé votre mode d’écriture habituel ?

K.M. : J’ai toujours eu l’impression que mes créations, comme bon nombre de spectacles de cirque, étaient accessibles à tous. J’ai tout fait pour éviter de tomber dans la moralisation et dans l’infantilisme, qui sont à mon avis deux grands travers de la création jeune public. Je suis de l’avis que l’on peut parler de tout au jeune public, c’est pourquoi je me suis autorisé à poursuivre dans Portrait chinois une recherche commencée dans un spectacle pour adultes. J’ai toutefois veillé à verser un peu moins dans le second degré qu’à mon habitude, et à être un peu plus explicite. J’aimerais partager l’énergie propre au cirque, et ouvrir aux jeunes gens qui verront la pièce des horizons nouveaux.

Ce partage passera-t-il par une participation du public ?

K.M. : À cette heure où le spectacle n’est pas encore créé, j’aimerais que les enfants m’aident à dresser le portrait de K. Cela selon le principe du portrait chinois, jeu littéraire qui permet de révéler certains aspects de la personnalité d’un individu, à partir d’un questionnaire basé sur une identification avec des personnes, des animaux ou divers objets. Le portrait ne reposant pas sur une histoire écrite, mais plutôt sur des situations de jeu, il peut être ouvert au hasard, à l’improvisation.

Quelles sont ces situations que vous faites traverser à votre K ?

K.M. : K se lève, il va au travail, il prépare sa popote… Ou du moins il essaie de se livrer à ces activités quotidiennes. Car dans Portrait chinois, rien ne se passe comme il veut. Du fait de la structure rotative qui le supporte, il n’arrive pas à s’asseoir correctement sur une chaise, et les objets qu’il veut saisir s’envolent. Grâce à la force centrifuge, le centre de gravité de l’acrobate se déplace, le forçant à trouver d’autres équilibres. Que veut dire tenir debout quand le sol n’est plus stable ? Pour un circassien, cette question ouvre de vastes possibles.

 

Propos recueillis par Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Portrait chinois de Karim Messaoudi, celui d’un bonhomme qui ne sait pas se tenir


Au Théâtre de Sartrouville les 25, 28, 29 et 30 janvier 2020. Dans les Yvelines du 13 janvier au 14 mars 2020. Durée : 45 minutes.

 

Théâtre de Sartrouville et des Yvelines, Centre dramatique national,

Place Jacques Brel, 78500 Sartrouville.

Festival Odyssées en Yvelines,

du 13 janvier au 14 mars 2020.

Tél : 01 30 86 77 79.

www.theatre-sartrouville.com

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