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LAURENT CUNIOT ET JEAN-CHRISTOPHE SAÏS

LAURENT CUNIOT ET JEAN-CHRISTOPHE SAÏS - Critique sortie Classique / Opéra
© Enricco Bartolucci

Publié le 10 juin 2012

THEATRE DE L’ATHENEE / L’HISTOIRE DU SOLDAT DE STRAVINSKY
MISE EN SCENE JEAN-CHRISTOPHE SAÏS / DIRECTION LAURENT CUNIOT

STRAVINSKY AU THEATRE

La production de L’Histoire du soldat créée l’an dernier par l’Arcal est accueillie pour cinq représentations au Théâtre de l’Athénée. Autour de son soldat, « sorte de Pierrot lunaire ou de Petit Prince » en apesanteur, Jean-Christophe Saïs convoque sur scène les musiciens de TM+ et leur chef Laurent Cuniot, impressionnant en diable.

“Chacun trouve
à s’inspirer de la
présence de l’autre.”
Jean-Christophe Saïs
 
 
Quelle est l’origine de cette production de L’Histoire du soldat ?
Jean-Christophe Saïs : Stéphane Lissner m’avait proposé de monter l’œuvre pour le Festival d’Aix-en-Provence. Mais il est parti à la Scala de Milan et le projet n’a pas abouti. J’ai cependant gardé l’idée et, après avoir travaillé avec Laurent Cuniot sur Les Quatre Jumelles de Régis Campo, je lui ai proposé de participer à cette aventure avec l’ensemble TM+ et de jouer le personnage du diable tout en assumant son rôle de chef d’orchestre.
Laurent Cuniot : J’ai immédiatement été très enthousiaste, parce que je recherchais justement cette connaissance de l’intérieur de la scène. Mais j’ai été un peu effrayé aussi par ce que me proposait Jean-Christophe. L’idée dramaturgique est géniale, mais pour réussir un tel pari, il fallait que s’installe une confiance absolue les uns envers les autres.
 
Quelle est la difficulté de faire jouer sur scène des musiciens qui n’ont pas à l’origine de formation d’acteur ?
J.-C. S. : À vrai dire, je n’ai pas vu cela comme une difficulté ; au contraire, ça a été un vrai bonheur ! De toute façon, mon idée était de partir de la musique, de partir des musiciens, du mouvement de leurs corps, de leur manière d’être avec l’instrument. Laurent a pris des risques énormes et tout le monde a suivi.
L. C. : En me faisant travailler le texte de Ramuz comme une partition, Jean-Christophe m’a tout de suite mis en confiance sur le personnage du diable. Pour les instrumentistes, c’était un peu différent, puisqu’ils n’ont pas de texte, mais une des grandes forces de la dramaturgie est d’installer tous les protagonistes dans un même mouvement scénique, dans une même construction organique.
 
Qu’est-ce que les différents artistes se sont apportés les uns aux autres ?
J.-C. S. : Ils ont été une source d’inspiration constante. Ils m’ont donné les clés d’un vrai langage commun. Le but était d’arriver à cette osmose entre la musique, le texte et la danse, que chacun trouve à s’inspirer de la présence de l’autre. Mathieu Genet, qui joue le soldat, m’a dit après une représentation : « tu ne peux pas savoir la puissance que me donne la musique ! ». Je n’ai jamais eu l’impression de travailler avec un groupe mais avec des êtres singuliers, leur sensibilité, leur univers poétique.
L. C. : Tous les musiciens connaissaient très bien l’œuvre d’un point de vue musical, mais je crois que les répétitions et les représentations ont permis d’en approfondir encore la compréhension par la dimension dramaturgique. Cela permet de lier le texte à la musique, ce qui est l’une des grandes difficultés de cette œuvre. Aujourd’hui, il est difficile de rejouer L’Histoire du soldat dans une version « de concert », même si cela nous permet de nous ré-agréger de façon moins périlleuse. On l’a fait cependant et je dois dire que le jeu musical était complètement nourri par l’expérience de la scène.
 
Cette proximité trouvée entre la musique et le théâtre vous inspire-t-elle d’autres projets ?
J.-C. S. : Il n’existe plus comme avant une telle séparation entre les disciplines. De plus en plus aujourd’hui, les arts se mêlent et cela crée une nouvelle forme complexe. Après, tout est question de volonté et de désir ; pourquoi pas monter la Passion selon Saint Mathieu de Bach ? Cela me semble faisable. L’essentiel est que les musiciens agissent sur le plateau.
L. C. : Il me semble très important de garder aussi la forme simple du concert, qui privilégie le rapport à l’écoute et où le regard est surtout porté sur le geste du musicien, sur sa virtuosité. Cela dit, il y a des expériences intéressantes à envisager. On peut sans doute par exemple aller plus loin dans la représentation, l’aspect scénique d’un concert. C’est quelque chose qui souvent manque aux musiciens : on n’occupe pas pleinement la scène. C’est pourquoi toutes ces expériences partagées avec d’autres artistes ne peuvent que nous enrichir.

Propos recueillis par Jean-Guillaume Lebrun


 
Le 16 juin à 20h, le 17 juin à 16h, le 19 juin
à 19h, les 20 et 22 juin à 20h. Tél. 01 53 05 19 19.

A propos de l'événement



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