La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -158-enghien

Julie Bougard

les troubles de l’âme humaine des rires aux larmes

L’auteur et metteur en scène russe Nikolaï Kolyada a fait le voyage depuis son théâtre d’Ekaterinbourg pour nous présenter Hamlet et Le Révizor : deux classiques transfigurés par sa vision du monde et du théâtre.

Publié le 10 mai 2008

L’ère internet : vies virtuelles et mutations sociales en question

Vidéos à foison, saynètes de rien, moments intimes ou anecdotes tournées en clip… A l’ère d’internet, l’homme semble pouvoir se livrer sans limites à la contemplation de la banalité et l’exhibition de soi. Julie Bougard, 35 ans, et Marc Stephan, 40 ans, observent ce grand marché de l’autopromotion et des vies parallèles, cette tentative insensée de créer « l’immortalité digitale. »

« Ces phénomènes de voyeurisme, d’exhibitionnisme, d’exposition de soi nous ont intrigués. »
 
Pourquoi vous intéresser aux sites comme « You Tube », « myspace » ou « facebook » ?
Nous avons été surpris par le nombre de nouvelles vidéos postées et de consultations par jour. Des séquences où des gens se montrent, dévoilent leur intimité, voire, sur certains sites web, s’exhibent dans des ébats sexuels. Voilà qui tranchait avec notre conception de la sphère intime et avec notre attitude face à l’image. Peut-être est-ce une différence générationnelle. Contrairement aux ados qui semblent nés avec un clavier au bout des doigts, ce monde virtuel nous était étranger. Pendant un an, nous l’avons observé. Il tourne sur lui-même et peut se déployer presque à l’infini, s’arpenter au gré des clics durant des heures, même des jours. Les « social networks » donnent l’illusion de nouer des liens avec d’autres personnes, de constituer un réseau de connaissances, de fraternité. Ces phénomènes de voyeurisme, d’exhibitionnisme, d’exposition de soi nous ont intrigués.

Dans Pour comprendre les médias, ouvrage publié en 1964, Marshall McLuhan montrait l’influence qu’exercent sur l’individu la radio, la télévision et l’ordinateur, qu’il considérait comme le prolongement de ses organes physiques et de son système nerveux. Connaît-on une nouvelle étape dans ce processus ?
Ce que pointait McLuhan, c’est-à-dire la disparition du corps physique et du point de vue dans le monde électrique, n’a fait que s’amplifier avec internet, univers en permanente expansion. Chacun peut se fabriquer une existence parallèle virtuelle. Le rapport au monde passe par le cerveau, mais la vie à l’écran n’est en fait que pixels. Qu’advient-il du corps dans les médias ? Les progrès technologiques influent sur la socialisation. Grâce aux téléphones et ordinateurs portables, nous pouvons vivre en nomades tout en gardant notre espace privé à portée de main. Ces mutations modifient les comportements et les réactions face aux autres.

Comment, avec les outils numériques et le théâtre, mettez-vous en jeu cette problématique ?
Nous avons imaginé deux artistes – nous – dans un studio fabriquant des clips pour des « social networks ». Ils observent six vidéos, qui montrent en fait une même femme, que j’assume, sous six personnages différents : la pin-up, la tueuse, la sportive, etc. Ces six femmes ne « font » rien, si ce n’est se montrer, combler l’espace vide. Assis devant des consoles d’ordinateurs, Marc et moi-même discutons entre nous, ou au téléphone ou par internet. Nous essayons de comprendre la situation, de rentrer dans ce « village global », d’avancer. Comment faire pour avancer quand il n’y a plus d’histoire ?
Entretien réalisé par Gwénola David


XXXXXXX ou Productme, de Julie Bougard et Marc Stephan, le 14 juin à 19h. Réservation conseillée. www.productme.net.

A propos de l'événement



x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur la Danse

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur la Danse