L’Homme V.
Des interventions aussi surprenantes que [...]
Focus -233-Atelier de Paris / Centre de développement chorégraphique
Le jeune chorégraphe québecois ouvre le festival avec Data, solo dense et poétique.
Vous avez travaillé sur Data pendant plus de deux ans. Quel était l’objet de cette recherche ?
Manuel Roque : Après avoir longtemps été interprète, je ressentais le besoin de faire la part des choses entre ce qui, dans « ma » danse, venait des chorégraphes avec lesquels j’avais travaillé, et ce qui était plus personnel. J’ai cherché, improvisé, écrit… Pour comprendre peu à peu – cela peut paraître naturel, mais c’est une surprise quand on le réalise concrètement ! – que je m’étais construit avec les couches laissées par ces expériences. On n’invente rien à partir de zéro. Cette pièce s’est construite sur le thème de l’identité. J’ai cherché à nourrir l’interprète en moi, dans la solitude. Je me suis rendu dans les déserts américains : comment ces grands espaces extérieurs résonnent-ils avec les paysages intérieurs ? En contrepoint de ces espaces horizontaux, interminables, je suis allé à New York, dans ce fourmillement tout en verticalité… Le travail kinesthésique est ainsi très présent dans Data, qui s’est nourri de ces expériences sensorielles intenses.
Pourquoi ce titre, Data ?
M. R. : Ma recherche sur l’identité se confronte à ce que l’identité représente aujourd’hui : une somme de données informatiques qui sont censées nous définir. Cette obsession de la définition est très sensible quand on est un jeune créateur, assigné à dire « qui il est », à trouver au plus vite sa « signature »… A l’opposé, je revendique une identité en mouvement, fluide, malléable, en constant renouveau.
Comment en êtes-vous venu à travailler sur le Requiem de Fauré ?
M. R. : La première étape a été de mettre en scène un élément minéral – une grosse pierre – pour l’opposer à la gestuelle très organique qui avait émergé. Entre le minéral et l’organique, la nécessité s’est imposée de trouver aussi une composante spirituelle. J’ai alors, par hasard, entendu ce Requiem qui est presque une anti-matière… Il répondait en outre à mon travail physique, qui passe du micro au macro : des notes tenues que l’on entend à peine, puis des moments explosifs. Le risque cependant était d’être écrasé par une musique aussi puissante. L’une des solutions a été de spatialiser le son, pour en calibrer la présence. Nous avons aussi inséré des moments de silence, durant lesquels la danse affirme sa singularité.
Propos recueillis par Marie Chavanieux
Les 8 et 9 juin à 19H30.
Festival June Events. Dans divers lieux à Paris et Vincennes. Atelier de Paris, Cartoucherie, 75012 Paris. Du 8 au 20 juin. Tél. : 01 417 417 07.
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