Fouilles dans le bazar de l’existence
François Hiffler et Pascale Murtin liquident leur stock de souvenirs et déballent leurs fantasmes cauchemardesques. Attention : objets scéniques non identifiés !
« Depuis 1982 (avènement de Grand Magasin) nous prétendons, en dépit et grâce à une méconnaissance quasi totale du théâtre, de la danse et de la musique, réaliser les spectacles auxquels nous rêverions d’assister. A cet égard, ils sont très réussis et nous émeuvent. Notre ambition consiste à croire possible que d’autres partagent cet enthousiasme. » Ce manifeste, posé avec une insolence toute tranquille, lance un joli pied de nez aux affidés disciplinaires et autres grincheux coincés dans les œillères de la convention. Depuis qu’ils ont débarqué sur la scène, François Hiffler et Pascale Murtin brouillent, sans complexe et mine de rien, les attendus de la représentation. Ces deux-là fouillent dans le vaste bazar de l’existence pour fabriquer des spectacles qui cueillent l’absurde planqué au cœur des habitudes et passent en douce quelques sagaces réflexions sur notre époque, nos grandes questions et nos petites manies. En une vingtaine de pièces, numéros et performances, ils ont ainsi démonté pas mal d’évidences mécaniques et grippé nombres de raisonnements communs. Avec un style bien à eux, tout en décalages et contre-pieds, alliant burlesque régressif et étonnement faussement naïf.
Entre jeux de mots et absurde
Un genre de comique tout à son aise dans Ma Vie, qui tente de purger le stock des souvenirs entassés dans la mémoire. Entre confessions sincères et aveux publics, François Hiffler et Pascale Murtin égrainent un chapelet d’anecdotes, une kyrielle de menus faits et quelques révélations « sensationnelles ». Histoires de liquider sans rappel les diktats commémoratifs et les antiennes nostalgiques du passé glorifié, tout en montrant comment le vécu innerve intimement chaque geste. Avec Mordre la poussière, ces dilettantes autoproclamés, experts en recensions drolatiques, ont décidé d’assouvir une bonne fois leur désir de revanches et leurs rêves les plus fous. Dans cette joyeuse partie en trois actes défile ainsi une série de rounds, alternant kung-fu chorégraphié à la Tati, expressions prises au mot, fantasmes pailletés et guimauve télévisuelle. Un facétieux règlement de compte !
Gwénola David
Ma Vie. Du 5 au 7 février 2008 au Studio-Théâtre. Mardi et jeudi à 19h30 ; mercredi à 20h30. Mordre la poussière. Du 28 février au 1er mars au Palace. Jeudi à 19h30 ; vendredi et samedi à 20h30.
Et aussi
En plus de ses créations et des productions qu’elle soutient, la Comédie de Béthune offre une programmation de qualité, accueillant formes classiques et propositions inattendues.
Du 29 au 31 janvier, le Palace accueille Le Cid, dans la très belle et très pure mise en scène d’Alain Ollivier. La compagnie des Chiffonnières et Cinérama installent leur chapiteau magique du 5 au 9 mars en face du Palace à Béthune et du 13 au 15 mars au Parc de la Lawe à Bruay-la-Buissière pour y mener l’inventif Bal des fous. C’est trop délicieux pour être de chair et d’os, variation sur Roméo et Juliette imaginée par Sophie Rousseau, investit le Studio-Théâtre du 17 au 21 mars. Le Palace accueille Sizwe Banzi est mort, mis en scène par Peter Brook, du 27 au 29 mars ; Bafouilles, spectacle conçu par Jean-Pierre Larroche, du 22 au 30 avril ; Chaise, d’Edward Bond, mis en scène par Alain Françon, les 5 et 6 mai. La saison s’achève au Palace avec Valère Novarina et L’Opérette, un acte de L’Opérette imaginaire, mis en scène par Marie Ballet et Jean Bellorini, du 13 au 15 mai.
Catherine Robert
La Comédie de Béthune. 138, rue du 11 novembre, BP 631 Béthune cedex. Réservations au 03 21 63 29 19. www.comediedebethune.org