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Focus -223-Convergences à l'Opéra national de Paris

Entretien / Jörg Widmann

Entretien / Jörg Widmann - Critique sortie Classique / Opéra Paris Opéra Bastille
Légende : le compositeur et clarinettiste Jörg Widmann © Marco Borggreve

Publié le 30 août 2014 - N° 223

Correspondances germaniques

Le compositeur et clarinettiste allemand, originaire de Munich et vivant aujourd’hui à Fribourg, joue avec la pianiste Elisabeth Leonskaja des œuvres de Mendelssohn, Schumann, Brahms et ses propres pièces. 

Quelle place occupent les sonates de Mendelssohn et de Brahms dans le répertoire pour clarinette ?

Jörg Widmann : Mendelssohn a écrit sa Sonate pour clarinette et piano à l’âge de treize ans. Dans le premier mouvement, on sent qu’il hésite encore esthétiquement entre Beethoven et… Rossini ! Le deuxième mouvement possède par contre une couleur typiquement mendelssohnienne, que l’on reconnaît en quelques secondes. Quant au troisième mouvement, son écriture contrapuntique est sidérante. Mozart ne maitrisait pas à un âge aussi précoce de telles techniques de composition. On peut aussi y voir un hommage à Bach, dont Mendelssohn a permis la redécouverte. Brahms a quant à lui écrit plusieurs chefs-d’œuvre pour la clarinette, en raison de son lien étroit avec le clarinettiste de l’Orchestre de Meiningen, Richard Mühlfeld. Il y a dans la Première sonate à la fois une maîtrise formelle absolue (en particulier de la forme sonate) et en même temps des éléments très modernes dans l’écriture, d’où l’admiration de Schoenberg pour cette pièce.

« Je suis fasciné par la spécificité de chaque compositeur : le traitement du registre grave chez Brahms, les accords de Schumann, la couleur de Mendelssohn. »

Quel lien faites-vous entre vos propres œuvres programmées dans ce concert, la Fantaisie pour clarinette solo et les Intermezzi pour piano, et la musique romantique allemande ?

J. W. : Les Intermezzi, qui ont été créés par le pianiste hongrois Andras Schiff, peuvent être vus comme un hommage à Brahms. Il sera donc intéressant d’avoir dans le même concert ces Intermezzi et la Sonate n°1 pour clarinette et piano de Brahms. Quant à la Fantaisie, qui est une œuvre de jeunesse (je l’ai écrite à vingt ans), elle n’a pas de source d’inspiration directe. Mais Schumann est l’un de mes compositeurs de prédilection et sans doute la construction de cette fantaisie, avec ses trois mouvements aux caractères contrastés, enchaînés sans pause – d’où la dimension physique de cette pièce -, possède un aspect schumannien.

La musique romantique allemande est-elle pour vous une influence majeure ?

J. W. : Au-delà du phénomène géographique, je suis fasciné par la spécificité de chaque compositeur : le traitement du registre grave chez Brahms, les accords de Schumann, la couleur de Mendelssohn. Mais la musique française est également très importante pour moi : je pense notamment aux œuvres de Pierre Boulez ou à Saint François d’Assise de Messiaen. Et également cela va peut-être vous étonner, j’ai une immense admiration pour Miles Davis !

Comment conciliez-vous vos activités de compositeur et de clarinettiste ?

J. W. : Cela demande beaucoup d’organisation. Actuellement, je compose un concerto pour piano pour Yefim Bronfman, le Philharmonique de Berlin et Simon Rattle tout en travaillant à la clarinette un programme Mozart. Mais je crois que ces deux activités sont mutuellement enrichissantes. En outre, je mène également une activité de chef d’orchestre, en particulier avec l’Irish Chamber Orchestra où je suis chef invité. Avec cet orchestre, nous poursuivons un important travail sur les symphonies de Mendelssohn. Je crois que toutes ces activités sont les formes différentes d’une seule et même chose. Il faut d’ailleurs se rappeler que dans le passé, il était courant qu’un compositeur pratique plusieurs instruments.

 

Propos recueillis par Antoine Pecqueur

A propos de l'événement

Jörg Widmann
du lundi 3 novembre 2014 au lundi 3 novembre 2014
Opéra Bastille
Place de la Bastille, Paris, France

Lundi 3 novembre à 20h.

Convergences, de septembre 2014 à juillet 2015. Opéra-Bastille, Amphithéâtre, Place de la Bastille, 75012 Paris. www.operadeparis.fr

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