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Entretien croisé Paul-Alexandre Dubois et Dorian Astor

Entretien croisé Paul-Alexandre Dubois et Dorian Astor - Critique sortie Classique / Opéra
Photo D. Astor et P.A. Dubois : crédit Pierre Charles

Publié le 10 octobre 2008

Musique et philosophie

Le philosophe et germaniste Dorian Astor, qui vient de publier une biographie de Lou Andreas-Salomé (Gallimard), s’associe au ténor Paul-Alexandre Dubois, fidèle de la Péniche Opéra, pour faire des « Lundis de la Contemporaine » une alchimie philosophico-musicale.

« Nous avons demandé à des compositeurs de mettre en musique des textes philosophiques. »

Quels ont été, dans l’Histoire, les liens entre philosophie et musique ?
Dorian Astor : Depuis l’Antiquité, les rapports entre musique et philosophie sont basés sur la notion d’harmonie – l’harmonie musicale étant la traduction de l’état du monde. Cette dimension cosmique de la musique se retrouve jusque dans les symphonies de Mahler. Avec Schopenhauer et Nietzsche, le rapport évolue. La musique devient l’expression d’un élan vital, passionné, « dionysiaque ».

Et aujourd’hui, sous quel aspect s’opère ce rapport ?
D.A. : Aujourd’hui, le problème de la création est un problème politique, or la politique est un axe privilégié de la philosophie. La création artistique engage des « machines » d’où la notion de constructivisme. Rappelons que Deleuze travaillait de manière transversale sur la peinture, le cinéma, la musique.
Paul-Alexandre Dubois : J’évoquerais également John Cage, dont les entretiens sont une expérience de perception des choses. Les détracteurs de Cage disent d’ailleurs que ce n’est pas un compositeur, mais un philosophe. En réalité, les deux sont intimement liés.

Comment s’organise la série des Lundis de la contemporaine ?
P-A.D. : Nous avons demandé à des compositeurs de mettre en musique des textes philosophiques. Nous avons sélectionné seulement des textes qui ont été prononcés, que ce soit à l’occasion de conférences, d’entretiens ou d’enregistrements radiophoniques.
D.A. : Paul Méfano a choisi un texte de Foucault, qui développe l’idée d’« hétérotopologie », c’est-à-dire la science des lieux autres, ces no man’s lands que crée la société. Thierry Machuel met lui aussi en musique un texte de Foucault, à propos du panoptique de Jeremy Bentham. Il s’agit d’un projet révolutionnaire de prison, qui intéresse d’autant plus Thierry Machuel qu’il travaille lui-même sur les milieux carcéraux de Clairvaux. Pascale Criton a collaboré pendant 20 ans avec Deleuze, elle a donc choisi de s’intéresser au « continuum » deleuzien, qu’elle illustre en travaillant notamment sur les micro-intervalles.

Pouvez-vous nous parler de Socrate de Satie, qui est le fil conducteur des Lundis de la contemporaine ?
P-A.D. : Satie se sert de trois textes de Platon, plus anecdotiques que philosophiques. C’est une musique sans drame, linéaire, qui a un rapport au temps très particulier. La voix est traitée simplement, sur un mode de parler-chanter. Cette œuvre est un vrai ovni !

Propos recueillis par Antoine Pecqueur


Premier Lundi de la contemporaine : Lundi 8 décembre à 20h30, autour du compositeur Paul Méfano. Places : 17 €.

A propos de l'événement



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