La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -166-biennale

Daniel Dobbels

Daniel Dobbels - Critique sortie Danse

Publié le 10 mars 2009

Mouvement rebelle

« A quelle condition danser quand le moindre des énoncés politiques humilie par sa vulgarité, sa brutalité, son schématisme ou son cynisme avéré ? » A cette question abrupte, Daniel Dobbels répond dans cette création commandée par la Biennale en singeant la rhétorique engagée par la force du geste libre.

« La danse ne répond pas à un ordre prédéterminé mais maintient l’hypothèse d’un geste libre, encore “inimaginé“. »
 
Danser, de peur… De quoi ?
Peut-être comme dans le tableau de Klee, « Tanze vor Angst » (« Danses devant l’angoisse ») : les personnages semblent danser avant que la peur envahisse l’espace, avant qu’elle paralyse les corps…
 
D’où vient cette peur ?
De voir tout ce qui fait mouvement de façon discrète, infime et non aliénée, étouffé par des hantises, par des oppressions fortes et insidieuses, médiatiques, politiques, économiques, sociales qui transforment les gestes en réflexes ou effets spectaculaires. Martha Graham remarquait déjà que les gens se mettent à bouger quand une menace pèse sur la société, en l’occurrence à son époque l’avènement du fascisme. On perd alors le “mouvement naturel“ : celui qui ne force rien, qui n’est le mime de rien, qui s’invente comme mouvement dans une autonomie que le monde appelle silencieusement. Aujourd’hui il faut répondre de, revendiquer… Or la danse puise sa force, depuis la fin du 19ème siècle, justement dans son caractère imprévisible. Sans être anarchique, elle ne répond pas à un ordre prédéterminé mais maintient l’hypothèse d’un geste libre, encore “inimaginé“.
 
Que peut la danse ?
Essayer justement de faire advenir des qualités de mouvement, une temporalité, anticipant les pièges qui enrégimentent le corps dans des gestes prédéterminés, voire l’immobilisent. Ici la chorégraphie produit plusieurs danses mais ne s’attarde sur aucune, comme si le temps manquait pour les développer. Les mouvements semblent suivre des enchaînements étranges, illogiques. Pour se dérober, les danseurs doivent paradoxalement s’exposer complètement et rester toujours en scène. Les corps ne cessent de danser pour fuir.
 
Vous retrouvez le compositeur Gérard Pesson, deux ans après L’Epanchement d’écho ?
Nous avons renversé le processus : j’ai chorégraphié puis il a composé. Sa musique d’une grande subtilité, très à l’écoute de la danse, est traversée par des états contrastés, furtifs, passant de la mélancolie à la jubilation.
 
Entretien réalisé par Gwénola David


Danser, de peur…, de Daniel Dobbels, le 7 mars à 21h, le 8 mars à 16h, au Théâtre Jean-Vilar Vitry-sur-Seine.

A propos de l'événement



x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur la Danse

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur la Danse