La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

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Antoine Coutrot, Emmanuel de Dietrich, Caroline Verdu

Antoine Coutrot, Emmanuel de Dietrich, Caroline Verdu - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 septembre 2008

Trois nouveaux directeurs pour La Pépinière

Antoine Coutrot, Emmanuel de Dietrich et Caroline Verdu viennent de prendre la direction de La Pépinière : un lieu à travers lequel ils souhaitent promouvoir des spectacles à la fois exigeants et populaires, des spectacles ouverts sur le monde d’aujourd’hui.

Comment vous êtes-vous rencontrés et comment l’idée de diriger un théâtre est-elle née ?
Antoine Coutrot : Emmanuel et moi nous connaissons depuis près de 20 ans. Nous avons tous les deux collaborés avec Alfredo Arias, auprès de qui nous avons développé un travail commun de production. Peu à peu, l’envie de produire d’autres spectacles que les siens nous est venue.
 
Emmanuel de Dietrich : Mais, très vite, nous sommes arrivés à l’idée que, n’étant ni l’un ni l’autre metteur en scène, l’unique voie pour donner naissance à nos projets de production et de programmation était de diriger un théâtre privé. C’est à ce moment-là que nous avons rencontré Caroline. Et nous nous sommes aperçus que nous avions tous les trois la même vision de la gestion d’un lieu…
 
Caroline Verdu : Ainsi que les mêmes goûts en terme d’écriture. Pendant quatre ans, nous avons essayé de trouver un endroit pour monter Shitz et Europeana. Tout le monde nous a dit qu’il s’agissait de textes très intéressants, mais nous ne sommes pas parvenus à trouver un seul théâtre acceptant de nous aider à créer ces spectacles.
 
Antoine Coutrot : Puis, un jour, François de la Baume, avec qui nous travaillions déjà depuis quelques années, a racheté La Pépinière-Opéra en nous confiant la direction commune de ce théâtre. C’est un lieu idéal pour nous, une salle ni trop grande ni trop petite, qui possède déjà l’image d’un endroit en dehors des sentiers battus, d’un endroit dans lequel on peut voir des choses différentes de ce qui est présenté dans les autres théâtres privés.
 
Quelle ligne artistique souhaitez-vous défendre à travers votre programmation ?
Caroline Verdu : Notre idée de départ est vraiment de défendre la création. Nous savons très clairement que nous souhaitons faire découvrir des textes et des auteurs d’aujourd’hui. Mais nous n’avons cependant pas envie de nous fixer des limites. La perspective d’un cadre artistique totalement figé nous fait un peu peur.
 
Emmanuel de Dietrich : Ce qui est le plus important, c’est que nous gardions une cohérence dans nos choix. Il me semble, à ce titre, que Shitz et Europeana sont deux projets emblématiques des spectacles que nous souhaitons programmer à La Pépinière. Pour prendre l’exemple d’Hanokh Levin, il parle de choses fondamentales avec générosité, de choses qui sont susceptibles de toucher un très large public.
 
Antoine Coutrot : Car, la dimension accessible des spectacles et des écritures est pour nous essentielle. Le théâtre que nous souhaitons défendre est un théâtre ambitieux, mais ouvert à tout le monde, un théâtre pointu, mais populaire.
 
Pour vous, l’idée de générosité est donc fondamentale …
Emmanuel de Dietrich : Oui, absolument fondamentale. Nous voulons vraiment travailler en premier lieu pour le public.
 
« Le théâtre que nous souhaitons défendre est un théâtre pointu, mais populaire. » (Antoine Coutrot)
 
D’ailleurs, nous ne nous interdisons pas du tout de présenter de simples moments de rire, des spectacles de pur divertissement. Mais, il est vrai que nous aimons bien l’idée que les textes que nous faisons découvrir aux spectateurs les amènent à une forme de réflexion, les conduisent d’une façon ou d’une autre à reconsidérer le monde. Par exemple, Europeana parle de l’horreur de l’histoire mais avec beaucoup de dérision. Cette façon de mêler profondeur et humour correspond tout à fait aux œuvres que nous souhaitons présenter à La Pépinière.
 
Caroline Verdu : Je tiens à préciser que nous n’avons aucune intention de donner des leçons à qui que ce soit. Nous voulons juste proposer des spectacles de qualité qui puissent avoir la chance d’être vus durant plusieurs mois, des spectacles populaires, des spectacles qui puissent toucher beaucoup de monde.
 
Quelle place souhaitez-vous donner à la mise en scène dans votre théâtre ?
Antoine Coutrot : Une place capitale. Nous tenons à établir un lien fort entre les textes et la mise en scène, favoriser l’émergence de recherches scénographiques fortes, d’idées, d’images marquantes. Car, finalement, la meilleure façon de donner naissance à des spectacles passionnants, c’est évidemment de choisir un bon texte, mais c’est aussi de ne pas laisser la mise en scène de côté.
 
Shitz et Europeana sont deux spectacles qui parlent de notre époque. Est-il pour vous important de donner à entendre des textes qui soient comme des fenêtres ouvertes sur le monde d’aujourd’hui ?
Emmanuel de Dietrich : Oui, car nous voulons revenir à un théâtre vivant. Ce qui ne veut pas dire que nous n’allons présenter que des textes qui traitent de l’actualité. Mais, pour nous, il est important que le public se sente concerné par ce qui se passe sur scène. Encore une fois, nous n’avons aucune ambition de révolutionner le théâtre. Mais nous n’avons pas du tout envie que La Pépinière soit le lieu de cérémonies artistiques qui ne concernent qu’une petite classe socioculturelle privilégiée.
 
Caroline Verdu : Et puis, nous aimerions mettre un place un travail avec les adolescents, à travers des partenariats avec les écoles. Ceci pour participer, à notre façon, à la formation des spectateurs de demain. Quand Emmanuel dit que nous souhaitons revenir à un théâtre vivant, cela vaut aussi pour l’endroit que nous investissons. Il est très important qu’un théâtre soit un lieu d’accueil et de convivialité, et pas seulement le soir. Nous aimerions que La Pépinière puisse accueillir de la musique, des lectures, des conférences, des expositions…
 
Antoine Coutrot : Pour résumer, nous avons envie de diriger un théâtre ouvert, un théâtre dans lequel il se passe beaucoup de choses et des choses différentes. Nous tenons à sortir de l’idée du théâtre musée pour faire de La Pépinière un lieu traversé par la vie et les envies.
 

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat


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