Annabelle Sergent : Créer de l’imaginaire

Quelles relations établissez-vous entre le théâtre et le conte ?

Annabelle Sergent : Je travaille sur la narration au théâtre, c’est-à-dire sur les endroits de parole qui prennent en compte à la fois le récit et le réel. J’aime cet état de parole qui crée de l’imaginaire, qui peut s’arrêter à tout moment pour revenir au « temps zéro » de la représentation. L’art du conteur est un art dépouillé, qui revient à se demander comment créer des images, des sensations chez celui qui écoute. Raconter une histoire ne suffit pas. Il faut créer sa langue, trouver sa poétique, inventer une signature artistique. C’est dans l’écriture que se pose l’acte de l’artiste-conteur. Le conte véhicule des archétypes qui creusent l’imaginaire et viennent nourrir la langue, la prise de parole. Ecrire de la langue, c’est écrire du temps.

Comment nourrissez-vous votre inspiration ?

A. S. : J’ai navigué dans les contes, les mythes, ai retrouvé des figures semblables dans la poésie et le théâtre. Je me suis notamment appuyée sur des contes pour composer, avec le slameur Vincent Loiseau, La Trilogie Héroïque. Nous avons mêlé nos imaginaires pour décoller les récits de leur endroit statique, leur redonner vie, à travers le prisme de l’enfance. Je pense l’espace de la scène comme un volume en trois dimensions dans lequel projeter mon imaginaire. Je travaille ainsi avec le vide de la scène, travaillant sur l’abstraction plutôt que l’illustration.

Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat