La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Danse - Entretien / Gabriela Carrizo et Franck Chartier

Diptych de Peeping Tom

Diptych de Peeping Tom - Critique sortie Danse Paris Opéra Garnier
Crédit : Virginia Rota/Peeping Tom Gabriela Carrizo et Franck Chartier

Opéra Garnier / Chor. Peeping Tom

Publié le 15 décembre 2020 - N° 289

Peeping Tom, la compagnie fondée par Gabriela Carrizo et Franck Chartier, est pour la première fois invitée de l’Opéra de Paris en ce mois de janvier avec Diptych (Diptyque). Nous les avons rencontrés.

Quelle est la genèse de Diptych ?

Gabriela Carrizo : En fait, il s’agit plutôt d’un triptyque dont nous ne présenterons que les deux premiers volets à l’Opéra de Paris, The Missing Door et The Lost Room. Au départ, nous n’avions pas l’idée de réaliser un triptyque. Nous avons d’abord répondu à une commande du Nederlans Dans Theater (NDT) en 2013. C’était la première fois que je créais pour une autre compagnie que Peeping Tom. Avec le NDT et ses danseurs à la technique incroyable, c’était un autre monde. La pièce devait être courte, car présentée dans un programme composé. Nous ne pouvions donc pas imaginer un grand décor comme à notre habitude car il fallait pouvoir le monter et le démonter rapidement. Cette nouvelle création adapte et réimagine cette pièce, ainsi qu’une autre créée aussi avec le Nederlans Dans Theater environ deux ans plus tard, en 2015.

Quel est le sujet de cette première pièce, The Missing Door ?

Gabriela Carrizo : Le spectacle commence quelques secondes avant la mort d’un personnage. Les spectateurs découvrent ce qu’il se passe dans sa tête. C’est une sorte de flash-back, qui raconte l’histoire d’un couple, accompagné d’autres personnages, peut-être des fantômes, qui vivent dans cet endroit et sont habités par d’autres souvenirs. On comprend qu’il s’est passé un drame dans cette histoire de couple. Cette faille se devine par le montage, dans le mouvement même ponctué d’arrêts, de moments figés, comme des photos ou des instants de décalage où les choses ne sont pas synchrones.

Franck Chartier : J’aimais beaucoup l’idée de Gabriela de proposer un décor réaliste de cinéma, une sorte de couloir assez abstrait, rythmé par des portes. Les personnages entrent dans cet espace, s’entourent d’objets, manipulent les lumières. Ils sont les acteurs de la fiction.

Comment en êtes-vous arrivé à développer cette histoire initiale ?

Franck Chartier : Lorsque le NDT m’a invité à réaliser une autre création, nous  avons pensé pourquoi ne pas faire la suite ? Je m’étais attaché aux personnages de la pièce de Gabriella, et j’avais envie de les développer. Je répétais à La Haye, il y avait des bateaux, beaucoup de mouettes, je logeais dans un appartement au-dessus d’un canal, c’était très inspirant. J’ai eu l’idée de placer ce couple initial sur un bateau, dans une cabine, The lost room, et d’entrer un peu plus dans l’intimité de ce couple. Nous avons expérimenté des changements de décor cinématographiques d’une scène à l’autre, afin que les transitions se déploient en nouvelle donnée dramaturgique. Le bateau, c’est un confinement. Le couple y est enfermé, avec des gens pas nécessairement choisis. Comment réagir ? Que vit-on dans ce huis clos ? Pour nous ce sont des problématiques attirantes.

« C’est la situation, la façon de transformer le mouvement, qui vont nous faire décoller de la réalité. » Gabriela Carrizo 

Comment amenez-vous ces atmosphères, ces images qui sont parties intégrantes de votre signature ?

Gabriela Carrizo : Outre la lumière, l’espace, le temps, c’est la situation, la façon de transformer le mouvement, qui vont nous faire décoller de la réalité, en devenant plus fantastiques, en s’approchant du domaine de l’inconscient. Avec des effets techniques, par le travail de la lumière ou du son, on peut opérer des zooms. Pour nous, le son est très important. Comme pour un film, la musique conditionne l’image, permet de se focaliser sur un détail. Un petit son amplifié transforme une scène. Le bruit d’une poignée de porte peut suffire à déclencher la peur. Pour ce triptyque, nous avons travaillé avec la française Raphaëlle Latini qui explore vraiment cet aspect-là du son, le design sonore.

Pourquoi ne présentez-vous à l’Opéra que les deux premiers volets ?

Franck Chartier : La troisième partie, The Hidden Floor, se passe en plein milieu de l’océan ! A l’Opéra Garnier, ils étaient plutôt inquiets de voir l’eau se répandre sur la scène en pente. Nous avons essayé de les convaincre, en vain.

Vous avez complètement renouvelé votre équipe de danseurs pour ce triptyque. Pourquoi ?

Franck Chartier : Nous tournons notre autre triptyque, Vader (Père), Moeder (Mère), Kind (Enfant), il nous fallait donc une deuxième équipe. Avec le niveau formidable des danseurs du NDT, chaque rôle était doté de spécificités techniques très poussées. Nous avons donc mis en place une audition afin de trouver des performeurs sélectionnés en fonction des personnages à incarner, pour nous permettre d’aller plus loin.

Propos recueillis par Agnès Izrine

A propos de l'événement

Diptych de Peeping Tom
du mercredi 6 janvier 2021 au dimanche 10 janvier 2021
Opéra Garnier
Place de l’Opéra, 75009 Paris

Tél. 08 92 89 90 90. Durée 1h10.

Également les 4 et 5 mars à L’Onde Théâtre de Vélizy.

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