Diane Scott

©Crédit photo : Vincent Le Corre

Crédit photo : Vincent Le Corre

Publié le 10 octobre 2007

Blanche-Neige dans un autre espace/temps

Ouvrant la porte d’une autre vie à Blanche-Neige, Robert Walser a construit un jeu de pouvoir qui creuse les rapports au vrai et à l’amour. Diane Scott propose une version condensée, ouverte, de cet « après-conte » imbriquant suspension et mobilité.

« Robert Walser situe son texte après le conte des frères Grimm, dans un autre espace/temps. Tout a déjà eu lieu. Les personnages rejouent ce qui s’est passé avec, en épicentre, la relation entre la Reine et Blanche-Neige. Alors que le conte original développe une dynamique de crise, de croissance, de vie, Walser crée, au contraire, un effet de loupe et de ralentissement à l’intérieur duquel les personnages sont, eux, constamment en mouvement. Tout cela n’a rien à voir avec l’évolution dramatique d’une pièce classique. On est face à des enjeux très énigmatiques et profonds, notamment, à mon sens, l’intuition de Walser selon laquelle le meurtre de Blanche-Neige et la sexualité de la Reine sont une seule et même chose. Blanche-Neige apparaît ici comme une figure mélancolique qui au lieu d’aller vers le Prince, comme elle le fait dans le conte, tente de reconquérir l’amour de la Reine et de retourner au cercueil.

Une tentative d’ouverture sur les possibles de la pièce

J’ai procédé à un travail de réduction, d’assèchement de la pièce de Walser. Un peu comme si je n’avais gardé que le caillé du lait après décantation. Je ne veux pas dire que ce que j’ai coupé était secondaire, mais il me semble que peu de texte permet de mieux entendre le texte, et de le travailler autrement. Et puis, nous avons essayé d’inventer une manière de dire Blanche-Neige qui ne tente pas d’imposer au public un mode de réception. Je suis sensible aux œuvres qui posent des objets, plutôt qu’à celles qui déterminent comment il faut entendre les choses. Car, s’il y a une dimension politique au théâtre, et il y en a une, elle réside là. Non pas dans les thématiques dites politiques qu’un spectacle traiterait, mais bien dans son mode d’adresse. Dire un texte, c’est un peu comme si l’on posait la question du théâtre à chaque fois : est-ce que le théâtre existe, est-ce que nous parvenons à faire exister quelque chose ? »

Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat

Blanche-Neige, d’après Robert Walser ; adaptation et mise en scène de Diane Scott. Du 3 octobre au 4 novembre 2007. Le mercredi et le samedi à 19h00, le jeudi et le vendredi à 21h00, le dimanche à 17h00. Maison de la Poésie, passage Molière, 157, rue Saint-Martin, 75003 Paris. Renseignements et réservations au 01 44 54 53 00.

Carte blanche Diane Scott au MK2 Beaubourg à partir du 24 octobre 2007, informations sur www.lescorpssecrets.fr