Les Merveilles, mise en scène Robert Bouvier
Cette nouvelle création du metteur en scène, [...]
Trente-six spectacles d’environ une heure chacun : les artistes de Forced Entertainment, auxquels le Festival d’Automne consacre un portrait, interprètent l’intégrale des œuvres de Shakespeare avec une maestria hallucinante, qui mêle cocasserie et poésie. Exceptionnel !
Tim Etchells remarque que Shakespeare est comme un fantôme omniprésent qui hante la langue et la scène anglaises. Et l’on sait qu’il ne faut jamais laisser les fantômes au placard : ils s’y ennuient, y rancissent parfois et se manifestent comme l’inconscient venant tambouriner à la porte. En analystes adroits et malicieux, les membres de Forced Entertainment laissent donc la bride sur le cou du grand Will et lui permettent de s’exprimer par condensation et déplacement, métaphore et métonymie. Du rouleau de papier toilette au verre en cristal, du pot de moutarde au tube de shampoing, du moulin à poivre à la bouteille de vinaigre : les objets sont invités sur la table de bois fichée en milieu de scène et interprètent les rois anglais, les princes vénitiens, les vierges retorses et les jouvenceaux audacieux. Assis derrière la table, les comédiens manipulent ces petites marionnettes désopilantes, et on se met soudain à suivre avec émotion les inquiétudes amoureuses d’un flacon d’eau de rose…
Abolis bibelots de théâtre sonore
On se croirait installé dans la veillée d’une cuisine où le conteur mime son histoire avec ce qu’il a sous la main, ou dans un grenier où des enfants se déguisent avec les merveilles sorties de malles oubliées : il faut vraiment avoir déjà vu des acteurs géniaux interpréter Shakespeare pour ne pas trouver que le meilleur Shylock est le petit cadre argenté posé parmi les flacons qui jouent Le Marchand de Venise… Les comédiens racontent l’histoire, résument parfois l’intrigue, s’autorisant crasses et raccourcis, mimiques ironiques et tendres. Ils font preuve d’une humilité et d’une gentillesse confondantes, à la fois en totale complicité avec le public et en parfaite empathie avec le tube de cirage ou le pot de mayonnaise qu’ils actionnent avec humour. Robin Arthur, Claire Marshall, Cathy Naden, Terry O’Connor, Richard Lowdon et Jerry Killick se succèdent pour ce marathon en trente-six étapes, drôle et intelligent. Parce que l’on connaît Shakespeare, qu’on l’a déjà vu monté à toutes les sauces, cette version à la custard et au dentifrice ne déroute pas. Le texte est en anglais, mais même le plus irréductible des francophones s’y retrouve et jubile devant tant d’inventivité, de précision et de fantaisie. Le parti pris de l’ordinaire poétise les choses et rappelle le génie dramaturgique du maître élisabéthain. Si « totus mundus agit histrionem », même les salières y tiennent un rôle !
Catherine Robert
Calendrier et horaires sur www.theatredelaville-paris.com. Tél. : 01 42 74 22 77. Durée de chaque spectacle, entre 45 min et 1h. En anglais basique facilement compréhensible, non surtitré. Dans le cadre du Festival d'Automne.
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