Léonore Chaix a écrit et interprète « La Femme à qui rien n’arrive » dans la mise en scène d’Anne le Guernec, autour du néant de la modernité
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Pourquoi Nora abandonne-t-elle ses enfants ? Elsa Granat interroge Ibsen et organise le dialogue, 150 ans après sa création, entre la première femme libre du théâtre européen, ses héritiers et surtout ses héritières.
« King Lear Syndrome a commencé un cycle sur les conditions de l’héritage que je vais continuer avec Les Grands Sensibles, autour d’Hamlet et Roméo et Juliette. Je replace le texte dans sa perspective historique, du point de vue de ceux qui en héritent. J’interroge Une maison de poupée avec le regard des enfants de Nora, en imaginant qu’après avoir cherché l’adresse de leur mère enfuie, ils la retrouve sénile, dans un Ehpad, où elle est installée en compagnie de Linde, sa meilleure amie. Ces femmes sont incapables d’expliquer à la génération suivante pourquoi elles sont parties. Les enfants découvrent que Nora a conservé des babioles de sa vie d’avant : ils vont dépecer ces vestiges pour comprendre son histoire et son départ. Nora est la première femme libre du théâtre européen : sa libération se fonde sur le chagrin de ses trois enfants, ce qui, dès la création, a fait scandale. Reste l’acuité de cette question : comment se libérer sans anéantir les générations suivantes ? Comment comprendre la pièce ? Comment jouer ce petit cerveau, cet « écureuil », ce « petit oiseau »dont la conscience n’éclot qu’à la fin ? Ibsen a écrit pour son temps et pour des hommes. Écrivons pour des femmes qui ont un cerveau, même si elles ont un inconscient qui les corsète !
Dialogue entre les générations
Ibsen n’est pas réaliste. Il décrit des mouvements psychologiques plutôt que des situations sociales. Reste l’énigme de cette femme comme absente à elle-même qui, soudain, quitte tout : c’est ce hors-sol de la libération que je trouve suspect. Nora est inspirée par Laura Kieler, une écrivaine amie d’Ibsen qui a vécu la même histoire que celle qu’il raconte, et que son mari a fini par faire interner. Qui est Nora ? Un symbole de libération ou une femme qui finit en hôpital psychiatrique quand elle essaie de se libérer ? Ibsen n’est pas féministe. Selon lui, le monde des hommes est mauvais : pourquoi les femmes revendiquent-elles d’y entrer ? Le conflit qui se joue entre la loi du contrat, celle des hommes, et la loi de la vie, celle des femmes, est intéressant à repenser aujourd’hui. Voilà pourquoi confier la pièce à de jeunes comédiens a été passionnant. J’ai voulu relier, y compris dans la salle, les deux générations des féministes, celles qui ont plus de 40 ans et les plus jeunes. Lorsque Serge Tranvouez, directeur de l’ESAD, m’a proposé de diriger le spectacle de sortie, j’ai compris que c’était l’occasion de se retrouver autour de cette question brûlante. C’est aussi pour cela que j’ai voulu le jouer dans le vrai monde et pas seulement à l’école, en le concevant comme un spectacle d’insertion de la génération qui vient. »
Catherine Robert
Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16h30. Tél. : 01 43 28 36 36. Durée : 2h.
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