Jean-François Sivadier met en scène « Portrait de famille, une histoire des Atrides » avec de jeunes interprètes
Jean-François Sivadier met en scène 14 [...]
Créé en novembre 2018 au Quartz de Brest, repris la saison dernière en tournée, Autoportrait à ma grand-mère est aujourd’hui présenté aux Célestins – Théâtre de Lyon. Unique interprète de son texte, l’écrivaine-metteuse en scène-performeuse Patricia Allio nous parle de sa grand-mère, d’elle-même, de leurs existences respectives, de la Bretagne… Une réflexion — sensible, aiguë, très attachante — sur la possibilité d’être soi dans une société dominée par les normes.
Beaucoup de morts montrent le bout de leur nez dans ce récit publié aux Editions Les Solitaires Intempestifs et performé sur des plateaux par son autrice. Beaucoup de suicidés. Beaucoup de pendus. « En Bretagne, on se pend ou on se jette dans les puits », dit sans emphase et sans coquetterie Patricia Allio. L’artiste brut et agriculteur Jean Grard, par exemple, a mis fin à ses jours dans sa grange. L’un des enfants élevé par Julienne Le Breton, la « mémé Julienne » à laquelle renvoie le titre du spectacle, a également été retrouvé pendu. Pourtant, se dégage d’Autoportrait à ma grand-mère une forme de tranquillité résolue. Aucun sens du funèbre ne vient peser sur cette proposition d’une justesse rare. Aucun surplomb, aucune théâtralité superflue. Des mots composent des phrases qui décrivent des vies, des impressions, des émotions, des pensées sur la place dévolue à chacun dans notre société. Des archives sonores et visuelles viennent rendre compte de moments du passé. C’est la réalité droite, franche, concrète de l’existence qui s’exprime ici tout entière, à la faveur de conversations belles et simples entre une petite-fille et son aïeule, entre une performeuse et des publics venus l’écouter.
Une double plongée dans l’intime
À regarder l’espace radicalement blanc, entièrement dépouillé, au sein duquel évolue Patricia Allio (la création lumière et la collaboration scénographique sont signées Emmanuel Valette), on pourrait attendre de la raideur. Il n’en est rien, tout au contraire. Le théâtre de Patricia Allio, s’il se nourrit de réflexions précises et vives sur les événements du monde qui nous impactent, n’a rien d’un théâtre intellectuel. Il est tangible, humain, libre, généreux. En nous permettant de faire la connaissance de sa grand-mère décédée il y a dix ans, en nous confiant des pans de mémoire de la classe populaire dans laquelle elle a grandi, en mettant en miroir l’invisibilisation de multiples voies de singularité, Patricia Allio croise des lignes de perception éparses. Se compose ainsi, devant nous, avec nous, un kaléidoscope d’identités vulnérables. Ces femmes et ces hommes qui n’ont pas toujours conscience de se chercher, d’avoir honte, de se sentir coupables, d’être déterminés par des héritages involontaires nous paraissent à la fois fragiles et puissants. La performance de Patricia Allio leur rend hommage de manière très touchante. Elle les donne à aimer avec une clarté et une tendresse sans concession.
Manuel Piolat Soleymat
Le mardi, mercredi, vendredi et samedi à 20h30, le dimanche à 16h30, le jeudi à 20h. Spectacle vu le 13 octobre 2023 au Théâtre du Rond-Point à Paris. Durée: 1h30. Tél. : 04 72 77 40 00.
Également, le 29 avril 2025 au Théâtre du Strapontin de Pont-Scorff.
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