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Danse - Gros Plan

Triptyque de Sidi Larbi Cherkaoui

Triptyque de Sidi Larbi Cherkaoui - Critique sortie Danse
Crédit : Kurt Van Der Elst Légende : Avec Foi, Sidi Larbi Cherkaoui invente l’opéra médiévo-contemporain.

Publié le 10 juin 2010

Le chorégraphe parachève sa trilogie sur le lien du religieux et de l’identité à travers l’ethnicité et les langues.

Sans doute est-ce l’autre, dans son irréductible différence et sa curieuse diversité, qui aimante le geste de Sidi Larbi Cherkaoui. Mi-belge, mi marocain, chorégraphe passé du disco des plateaux télé aux Ballets C de la B d’Alain Platel, mêlant volontiers vocabulaire contemporain, gestuelle classique indienne, arts martiaux et chants polyphoniques, il a toujours intimement croisé les géographies et allié les extrêmes au cœur de sa danse. Dès Foi, son deuxième opus au titre provoquant créé en 2003, il invite en scène une ribambelle de personnalités non conformes – travesti, trisomique ou encore boulimique, cassant d’un généreux revers les formats classiques des corps usinés selon la joliesse standardisée. Enfermés dans le for intérieur de leurs contradictions, quelques dix-huit danseurs, chanteurs et musiciens, en décousent avec les croyances qui déchirent les chairs entre violence fanatique, mortification furieuse et quête du sacré.
 
Plaidoyer pour la tolérance
 
Creusant la veine ouverte par cet opéra médiévo-contemporain, Myth (2007) fouille les mythologies, ces histoires « qui n’ont pas de morale », qui disent la chute brutale du haut de l’innocence, quand les ombres du destin et les cailloux de l’existence collent à la peau de l’avenir. Bloqués dans une salle d’attente, une bibliothèque ou peut-être un purgatoire, les quatorze interprètes affrontent les vents contraires de leurs êtres, entre le matériel et le spirituel, holisme et dualisme, féminin et masculin. « On mène un combat contre soi-même, entre ses connaissances et son intuition ; tout repose sur une lutte de petite envergure entre deux pôles opposés, il y a toujours deux extrêmes qui bataillent pour s’affirmer en tant que réalité. » dit Larbi. Troisième volet du triptyque, Babel (words) (2010) assemble aussi des danseurs venus des confins du monde et frotte à vif les contrastes entre les cultures. Inspiré du récit biblique de La tour de Babel, cette symphonie de mots et de gestes pousse à bout la disparité des idiomes qui finit par séparer faute de pouvoir se partager. Loin de discourir en démonstrations, le chorégraphe travaille ces questions à même le mouvement et la personnalité des danseurs, en résonnance avec la musique. De Foi à Babel (words), la force évocatrice des images, la liberté d’imaginaire et la danse, stupéfiante d’inventivité gestuelle, de suaves contorsions et brutales déflagrations, insufflent une poésie puissante et critique qui dépose au pli des jours une douce mélancolie.
 
Gwénola David


Triptyque de Sidi Larbi Cherkaoui, du 17 juin au 7 juillet 2010, à 20h30 (Foi du 17 au 19 juin, Myth du 24 au 26 juin, Babel (words) du 1er au 7 juillet. Grande Halle du Parc de la Villette, 75019 Paris. Rens. : 01 40 03 75 75. A voir : Sidi Larki Cherkaoui, rêve de Babel, film de Don Kent et Christian Dumais-Lvowski (coproduction Arte France et Bel air média, 2009).

A propos de l'événement


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