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Théâtre - Critique

Tarquin, livret de Aram Kebadjian, mise en scène de Jeanne Candel

Tarquin, livret de Aram Kebadjian, mise en scène de Jeanne Candel - Critique sortie Théâtre Montreuil Nouveau Théâtre de Montreuil
Tarquin au Nouveau Théâtre de Montreuil DR

livret de Aram Kebadjian / Mes Jeanne Candel

Publié le 24 septembre 2019 - N° 280

Perfectible, encore inabouti, Tarquin, dirigé par Jeanne Candel, propose un opéra-théâtre autour de la figure du Mal.

C’est un projet encore en construction que ce Tarquin mené par Jeanne Candel et le collectif de la vie brève. La metteuse en scène, qui dirige désormais le théâtre de l’Aquarium, y retrouve le musicien Florent Hubert, qui avait confectionné la musique du triomphal Crocodile trompeur il y a quelques années. L’axe du spectacle, une réflexion autour du Mal, se traduit en la recherche par une petite juge cocasse et déterminée d’un mystérieux individu nommé Tarquin. Le Mal est par nature insidieux, multiforme, insaisissable, capable de se glisser partout, et comme lui, Tarquin revêt de nombreux visages, de multiples identités. En filigrane, toutefois, s’esquisse la figure d’un nazi en fuite, type docteur Mengele. Il aurait commis des « choses abominables au nom de la science », et on le recherche dans une contrée évoquant l’Amérique centrale : climat humide, végétation luxuriante, paroles et musiques aux accents hispanisants. Mais comme le Mal fascine tout autant qu’il effraie, ce Tarquin prend aussi des figures de gourou, de figure ensorcelante, fantasmagorique, susceptible en une apparition de vous renvoyer à l’état de petit enfant obéissant.

Mêler l’étrange et l’absurde, le poétique et le policier

Jeanne Candel et ses interprètes-musiciens créent au plateau. Leur travail est construit à partir d’improvisations et de recherches communes, il est toujours en mutation. Pour cette deuxième, disons-le, il n’avait pas encore trouvé sa forme. Problèmes de rythme, de jeu avec des personnages trop peu dessinés, la faute également à une structure narrative excessivement énigmatique, à des situations flottantes qui perdent le spectateur. Malgré cela, Léo-Antonin Lutinier, qui accompagne le collectif depuis ses débuts, s’en sort une fois de plus merveilleusement bien, acteur inventif et déroutant aux ruptures renversantes. Musiques aux accents baroques, jazzy et issues du folklore sud-américain s’articulent également de manière très convaincante avec les passages théâtraux, dans un mélange qui confère à cette singulière forme d’alliance du théâtre et du lyrique un charme hors pair. Dans cette forme inachevée, on devine également l’ambition de concilier l’étrange et le drôle, le poétique et le policier, le réel et le fantasme, le désir de traverser des registres multiples qu’on n’a pas forcément l’habitude de marier. Ambition louable. Mais le spectacle peine ainsi à trouver sa note, sa couleur, et la traque de Tarquin dans ce grand édifice de couleur sable, aux mosaïques vert d’eau et aux tuyaux de plomberies habités, comme les sous-sols, par d’étranges esprits, se perd dans une forêt d’intentions par trop alambiquée.

Eric Demey

A propos de l'événement

Tarquin, livret de Aram Kebadjian, mise en scène de Jeanne Candel
du vendredi 20 septembre 2019 au dimanche 6 octobre 2019
Nouveau Théâtre de Montreuil
10 Place Jean Jaurès, 93100 Montreuil

à 20h, le samedi à 18h, le dimanche à 17h. Tel : 01 48 70 48 90. Puis à Lorient, Valence, Nantes, Caen et Orléans.

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