La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre

Stéphane Ricordel/Laurence de Magalhaes

Stéphane Ricordel/Laurence de Magalhaes - Critique sortie Théâtre

Publié le 10 octobre 2009

Le Silvia Monfort prend la tangente avec une nouvelle direction

Ça tape, ça cloue, ça perce, ça peint, ça jardine… Bref, depuis juillet dernier ça s’active drôlement au Silvia Monfort ! Le gris béton qui jusqu’alors guidait le spectateur vers l’entrée du théâtre rougit maintenant de plaisir et sourit au parc Georges Brassens. Après 15 ans passés à sillonner le monde, Laurence de Magalhaes et Stéphane Ricordel, membres fondateurs du fameux collectif Les Arts sauts, se sont enfin posés et ont repris la direction du théâtre. Avec une quinzaine de spectacles, leur première saison témoigne d’une programmation exigeante, pluridisciplinaire, ouverte et résolument en prise sur la création contemporaine.

Comment passe-t-on des Arts sauts au Silvia Monfort ?
Stéphane Ricordel : Cette aventure s’inscrit plus en continuité des Arts Sauts qu’en rupture. Au moment d’engager la création d’Ola Kala en 2002, dernier spectacle de la compagnie, nous avions décidé collectivement d’arrêter à l’issue de la tournée, car les corps vieillissent, et encore plus durement pour des acrobates de haut vol. Nous avions donc déjà envisagé la question de la reconversion. Pour nous, elle s’est très vite orientée vers le désir d’animer un lieu, comme une façon de poursuivre l’itinérance non plus en parcourant le monde, mais accueillant des artistes du monde, en faisant voyager le public à travers des formes, des cultures, des univers artistiques différents. Peut-être aussi parce que l’un comme l’autre venions du théâtre à l’origine et que nous avons toujours eu une grande curiosité pour la création.
 « Nous l’imaginons comme un espace de liberté, d’invention, de dialogue. Notre projet repose sur la rencontre entre les artistes et le public… »

Laurence de Magalhaes
 : Nous avons tourné 15 ans avec notre salle de spectacle, le chapiteau-bulle. Nous avons donc l’expérience de recevoir du public, avons nous-mêmes vécu les conditions d’accueil des compagnies et le rythme d’une programmation. Nous avons aussi pu rencontrer beaucoup d’artistes dans les 53 pays où nous avons joué. Aujourd’hui que nous vivons concrètement la direction d’un théâtre, la continuité me semble encore plus évidente.
 
Quelles sont les contours du projet que vous rêviez ?
S. R. : Nous l’imaginons comme un espace de liberté, d’invention, de dialogue. Notre projet repose sur la rencontre entre les artistes et le public, vœu qui reste trop souvent une bonne intention sans réalité. En tant qu’artistes, nous nous sommes toujours posé la question du rapport au public : comment donner pour recevoir, recevoir pour donner. Nous voulons transposer cette démarche-là dans un théâtre à Paris.
L. M. : Nous avons aussi conçu le projet du Monfort en cherchant des complémentarités par rapport au contexte parisien, qui offre déjà une grande richesse de propositions. De toute façon, ce sont les artistes qui feront le lieu. Nous créons les conditions et l’occasion de la rencontre. Par exemple, nous avons complètement repensé et rénové le théâtre, comme une maison.
 
Autrement dit, vous faîtes du Monfort un vrai lieu de vie artistique, de convivialité et de découverte ?
L. M. : Tous les moments sont importants : le spectacle bien sûr, mais également l’avant et, l’après.
S. R. : Le partage est la base de notre travail, tant avec les spectateurs qu’avec les artistes, depuis les prémisses d’un projet jusqu’à sa concrétisation. Nous savons d’expérience que la générosité encourage la générosité : mieux on est accueilli, plus on donne le meilleur de soi-même.
 
Même si la culture participe du système marchand, elle ne s’y réduit pas, elle garde justement cette part inestimable, de don.
S. R. : Oui, qui s’accorde aussi aux valeurs de respect et de confiance qui sont les nôtres.
L. M. : …et se traduit également par une éthique économique vis-à-vis des compagnies, même si nous savons que les conditions sont difficiles.
 
Cette première saison montre aussi cette exigence, avec des propositions où le travail sur la forme est un questionnement sur le sens…
S. R. : Nous concevons la programmation comme un spectacle, que nous composons avec les couleurs, les rythmes, les particularités propres à chaque proposition pour créer une dramaturgie d’ensemble. Cette saison est à la fois internationale, transversale et diversifiée, avec du théâtre, de la danse, du cirque contemporain et des opéras chinois.

L. M. : Nous l’avions voulu ambitieuse, surprenante et accessible à tous. La ligne de programmation ne restera pas figée. Ce lieu sera aussi à notre image, avec des coups de cœur, des envies de partages, des temps forts… du désir !


Entretien réalisé par Gwénola David

 

Le Théâtre Silvia Monfort, 106, rue Brancion 75015 Paris. Rens 0156083388. www.lemonfort.fr

A propos de l'événement


x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le Théâtre

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le Théâtre