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Théâtre - Critique

Serge Noyelle met en scène un stimulant « Tartuffe » entre verve comique et férocité

Serge Noyelle met en scène un stimulant « Tartuffe » entre verve comique et férocité - Critique sortie Théâtre Marseille Théâtre des Calanques
Lucas Bonetti (Tartuffe) et Elmire (Camille Noyelle) Crédit : Cordula Treml

Théâtre des Calanques / Texte de Molière / Mise en scène de Serge Noyelle

Publié le 20 janvier 2024 - N° 318

Serge Noyelle, co-directeur avec Marion Coutris du Théâtre des Calanques, metteur en scène iconoclaste dont on sait le goût pour les créations originales et décalées, choisit, aujourd’hui, de s’intéresser à cette œuvre majeure du répertoire classique.  Son Tartuffe ou l’Imposteur, tout en jouant avec les paradoxes du tragi-comique, appuie habilement sur le caractère satirique et sombre du travestissement. Stimulant.

« Tartuffe est un modèle ; il est l’exemple de l’homme en société tel que la norme le définit. La norme génère l’imposture. Nous devons nous en méfier. Tartuffe est d’une brulante actualité » note Serge Noyelle. L’intention déclarée, celle de faire éprouver toute la contemporanéité de la figure éponyme qui traverse les âges, est soutenue par la mise en valeur de la grande modernité de la pièce, regardée comme une espèce de « boule à facettes »« les masques opèrent comme des révélateurs ». Avec cette approche, la familiarité qui nous lie à ce puissant chef-d’œuvre dramatique est revitalisée tandis qu’est valorisée la part prise par toutes les figures dans le développement de l’intrigue. Rappelons le fil rouge de la pièce : Orgon, patriarche archétypal, fait preuve d’un aveuglement à peine croyable en accueillant chez lui un usurpateur qui se travestit en « homme de bien »,  et parvient à être promis à la fille déjà engagée du maître de maison, spolie la maisonnée de tous ses biens et courtise effrontément la mère, ce qui finira, non sans mal, par le perdre.

Une mise en scène d’une grande vitalité

Attentif aux oscillations tragi-comiques vertigineuses qui caractérisent « Tartuffe », le metteur en scène s’attache également à donner particulièrement à entendre cette violence omniprésente, cette cruauté portée par la duplicité, qui échappent au masque comique en assombrissant dramatiquement la pièce. Cette férocité est contrebalancée par la grande vitalité de la mise en scène. Et du jeu. De jeunes acteurs professionnels ont été choisis, qui  mettent toute leur fougue et leur enthousiasme – parfois un peu trop – au service des intentions qui président à leurs différentes interprétations. On peut tous les citer : Nino Djerbir (excellent Orgon), Lucas Bonetti (très jeune mais très persuasif Tartuffe), Jeanne Noyelle (Dorine), Camille Noyelle (Elmire), Guilhem Saly (Cléante), Marion Coutris (Madame Pernelle), Romain Noury (Damis), Louison Bergman (Mariane), Robin Manella (Valère), Julien Florès (Monsieur Loyal). Les comédiens évoluent dans un seul et même décor qui place au centre du plateau une table recouverte d’un drap blanc et peuplée de verres vides. Métaphore de l’ambiance de fête brutalement interrompue de la première scène, des réunions familiales harmonieuses mises à mal, elle doit aussi de trôner au rôle qu’elle tient dans la scène d’anthologie qui voit Tartuffe être démasqué par Elmire. Un choix scénographique aussi minimaliste qu’astucieux qui ne laisse place à aucun temps mort.

 

Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens

 

A propos de l'événement

Serge Noyelle met en scène un stimulant « Tartuffe » entre verve comique et férocité
du jeudi 25 janvier 2024 au samedi 3 février 2024
Théâtre des Calanques
35, Traverse de Carthage, 13 008 Marseille

Le jeudi 25 janvier à 20h, les vendredis 26 janvier et 2 février, les samedis 27 et 3 février à 20h30. Tél : 04 91 75 64 59.

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