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Théâtre - Critique

« Le Songe d’une nuit d’été » par Emmanuel Demarcy-Mota, une lecture féérique, joyeuse et belle de la pièce de Shakespeare

« Le Songe d’une nuit d’été » par  Emmanuel Demarcy-Mota, une lecture féérique, joyeuse et belle de la pièce de Shakespeare - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt
Philippe Demarle et Valérie Dashwood dans Le Songe d’une nuit d’été. © Jean-Louis Fernandez

Théâtre de la Ville

Publié le 20 janvier 2024 - N° 318

Emmanuel Demarcy-Mota réunit une pléiade de grands artistes pour une lecture féérique, joyeuse et belle de la pièce de Shakespeare : remarquable travail collectif pour un théâtre fédérateur.

Accorder les volontés particulières au service de l’intérêt général, faire œuvre commune en transcendant les vanités, inviter chacun au service du collectif et permettre à l’individu d’y trouver sa place et d’y briller pour contribuer à faire étinceler l’ensemble : Emmanuel Demarcy-Mota fait du théâtre en rousseauiste ! On pourrait croire que la féérie joyeuse du Songe d’une nuit d’été n’est pas politique. Elle l’est pourtant en ce qu’elle interroge les pouvoirs : celui des femmes, celui du désir, celui de l’inconscient tapi dans la forêt profonde que peuplent des elfes pulsionnels, et, surtout, celui du théâtre. Organiser la représentation de ces pouvoirs dans une communion totale apparaît donc comme une réussite démocratique brillante et revigorante. La dernière scène du spectacle, celle du tableau des amours tragiques de Pyrame et Thisbé, l’illustre puissamment. Le public athénien monte sur la scène de fortune des artisans pour commenter l’intrigue : tous font théâtre ensemble. Ainsi gagne le collectif réconcilié par la puissance fédératrice de la représentation : telle est la force politique du théâtre.

Le théâtre comme pays des merveilles

Tout, dans ce spectacle, concourt à sa beauté, fascinante et raffinée. La scénographie de Natacha le Guen de Kerneizon et Emmanuel Demarcy-Mota, les lumières de Christophe Lemaire et Thomas Falinower, les magnifiques costumes de Fanny Brouste et Véra Boussicot, la musique d’Arman Méliès, la vidéo de Renaud Rubiano et Romain Tanguy, le son de Flavien Gaudon fabriquent ensemble un univers onirique captivant. De sublimes images apparaissent par magie : Titania vole dans les airs ou sombre dans le sommeil en s’enfonçant jusqu’au troisième dessous, les elfes et les fées surgissent du sol et des arbres, Bottom est transformé en un âne drôle et poignant. Le texte, nouvellement traduit par François Regnault, est, comme tout ce qui se donne à voir, accessible et exigeant, à la fois élégant et pétulant. Les langues, les phrasés et les accents s’emparent de cette partition avec harmonie. La troupe du Théâtre de la Ville est éblouissante. Elodie Bouchez, Sabrina Ouazani, Jauris Casanova, Jackee Toto, Valérie Dashwood, Philippe Demarle, Edouard Eftimakis, Ilona Astoul, Mélissa Polonie, Gérald Maillet, Sandra Faure, Gaëlle Guillou, Ludovic Parfait Goma, Stéphane Krähenbühl, Marie-France Alvarez sont tous excellents au sein de ce collectif de jeu où, là encore, chacun rayonne en faisant scintiller les autres. Si la forêt du roi des elfes et de la reine des fées permet aux Athéniens venus s’y perdre de retrouver le bon sens et la vérité des attachements, le pardon des pères et la joie des nuits d’amour qui suivent la représentation théâtrale, il est fortement conseillé aux citoyens égarés qui voudraient en faire autant de se ruer au Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt !

 

Catherine Robert

A propos de l'événement

Le Songe d’une nuit d’été
du mardi 16 janvier 2024 au samedi 10 février 2024
Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt
2, place du Châtelet, 75004 Paris.

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h. Tél. : 01 42 74 22 77. Durée : 2h.

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