Sentinelles de Jean-François Sivadier
Théâtre de Sénart - Scène nationale
Publié le 17 décembre 2021 - N° 295Suite de pensées contradictoires sur l’expression artistique en général et la musique en particulier, le nouveau texte écrit et mis en scène par Jean-François Sivadier relate l’existence de trois adolescents ayant choisi de dédier leur vie au piano. Quoiqu’incarné par d’excellents comédiens, Sentinelles nous perd dans les zigzags de son esprit de démonstration.
Ils font preuve d’un sens du concret de chaque instant. Confèrent à leurs personnages des présences singulières, justes, vivantes. S’investissent physiquement, corporellement dans des scènes chorégraphiées extrêmement engageantes. Pourtant, l’énergie et le talent déployés par Vincent Guédon, Julien Romelard et Samy Zerrouki tout au long de Sentinelles ne suffisent pas à faire de ce spectacle l’aventure « éminemment artistique », « profondément humaine » voulue par le metteur en scène, et ici auteur, Jean-François Sivadier. Tout commence par une mise en abyme. Un ancien pianiste, Raphaël, anime une rencontre dont nous sommes l’assistance. Au centre de l’événement : Mathis, un virtuose de renommée mondiale livre diverses considérations sur l’interprétation et le rapport aux publics. Puis un flash-back rompt l’exercice pour nous plonger dans la jeunesse des deux musiciens et d’un de leurs amis, Swan, également pianiste. Les trois adolescents entrent dans la même académie de musique. Nous suivons leur parcours jusqu’à leur participation au Concours Tchaïkovski de Moscou.
Swan, Raphaël et Mathis
Très librement inspiré du Naufragé, roman de Thomas Bernhard au sein duquel l’auteur autrichien réunit trois pianistes, dont Glenn Gould, pour une réflexion sur le génie et les précipices de l’existence, Sentinelles n’a ni l’acuité, ni la drôlerie de son lointain repère. Cahin-caha, on suit les longues digressions explicatives mises bout à bout en ayant le sentiment d’assister à des argumentations trop souvent scolaires. Encore une fois, les trois acteurs présents sur scène ne sont en rien responsables de la nature artificielle de leur partition. Des thèses s’affrontent, semblant sorties de beaux livres académiques. Toutes sortes de références s’exposent et se développent. On attend des profondeurs de vie qui ne viennent pas. Ici, tout est dit, énoncé, démontré et l’on s’ennuie. Où sont les troubles, les creux, les arrière-plans, les contradictions des existences qui nous sont racontées ? Ces silences et ces énigmes manquent. Sentinelles passe à côté d’une forme de vérité.
Manuel Piolat Soleymat
A propos de l'événement
Sentinellesdu jeudi 6 janvier 2022 au samedi 8 janvier 2022
Théâtre de Sénart - Scène nationale
8-10 Allée de la Mixité, Carré Sénart, 77127 Lieusaint
Le 6 à 19h30, le 7 à 20h30, le 8 à 18h. Durée de la représentation : 2h20. Spectacle vu le 7 décembre 2021 au Théâtre National Populaire à Villeurbanne. Tél. : 01 60 34 53 60. www.theatre-senart.com
Egalement, les 13 et 14 janvier 2022 à la Maison des arts du Léman à Thonon-les-Bains, du 18 au 28 janvier au Théâtre des Bernardines à Marseille, du 2 au 4 février au Théâtre 71 à Malakoff, du 8 au 27 février à la MC93 à Bobigny, du 2 au 4 mars à la Comédie de Caen, les 24 et 25 mars à la Comédie de Colmar, du 29 au 31 mars à la Scène nationale de Vandoeuvre-lès-Nancy, du 5 au 7 avril au CDN de Besançon, du 13 au 15 avril à La Comédie de Clermont-Ferrand, du 26 au 28 avril au Bateau Feu à Dunkerque, les 4 et 5 mai à la Maison de la Culture d’Amiens, du 11 au 13 mai à la Comédie de Béthune.