Première mondiale d’Ex Machina par l’Orchestre National de Jazz
Maison de la Radio et de la Musique / première mondiale
Publié le 27 janvier 2022 - N° 296L’Orchestre National de Jazz (ONJ) jouera en première mondiale Ex Machina dans le cadre du festival Présences, à Radio France. Le répertoire a été coécrit par son directeur, Frédéric Maurin, et par le saxophoniste américain Steve Lehman, l’un des compositeurs les plus originaux du jazz actuel, qui a étudié auprès d’Anthony Braxton, Jackie McLean et Tristan Murail.
D’où est venue l’envie de travailler avec Steve Lehman ?
Frédéric Maurin : Elle date du moment où j’ai découvert sa musique, vers 2008-2009, époque où je me posais beaucoup de questions concernant l’écriture. Il développait, dans le langage qu’il utilisait, des techniques sur lesquelles j’étais moi-même en train de travailler. Dès lors que je l’ai rencontré, il y a 5 ou 6 ans, on s’est suivis mutuellement. Lorsque j’ai constitué mon projet pour l’ONJ, j’ai décidé de lui proposer de concevoir un programme ensemble, autour de ce qui nous passionne, en particulier l’ouverture des langages utilisés dans le jazz à ce qu’on appelle la « musique spectrale ».
Si vous deviez expliquer, en bref, les principes de cette dernière, que diriez-vous ?
F.M. : En préambule, je préciserais que ce que l’on écrit, lui ou moi, reste basé sur des questions rythmiques. Je le dis volontairement pour ne pas donner l’impression que nous serions dans une forme très abstraite de pensée musicale. Il suffit d’écouter les disques de Steve pour se rendre compte qu’il développe un langage rythmique très particulier, qui groove vraiment. La musique spectrale, pour la résumer, s’intéresse aux composantes qui permettent d’entendre les timbres et font la différence, par exemple, entre un son de trompette et de piano pour une même note jouée. Elle va chercher au cœur du son pour essayer d’inventer une musique orchestrale qui sonne différemment. Un élément est très important dans ce programme : l’utilisation de dispositifs électroniques, à la fois pour des interactions en temps réel et pour générer de la matière timbrale au moment de l’écriture, développés en partenariat avec l’Ircam.
« L’ONJ crée de la nouvelle musique depuis 35 ans ! »
Le festival se déroule cette année sous l’égide de Tristan Murail. En êtes-vous heureux ?
F.M. : Steve et moi sommes très honorés qu’il soit au cœur de cette édition, car Steve Lehman, d’une part, a fait sa thèse sous la direction de Murail à Columbia University et, d’autre part, j’ai eu la chance de le rencontrer en 2017 à Oxford où je présentais certaines de mes pièces dans un colloque sur la musique spectrale. C’est quelqu’un que nous admirons, l’un des grands compositeurs français de la dernière partie du XXe siècle et d’aujourd’hui. Il est l’auteur de pièces qui ont changé la façon de penser la musique au début des années 1980.
Présenter l’ONJ dans un festival de musique contemporaine revêt-il une forme de message ?
F.M. : On en a parlé avec son directeur, Pierre Charvet : je crois que c’est la première fois que l’ONJ est programmé à Présences. C’est génial qu’un tel festival se tourne vers d’autres formes de création : l’ONJ crée de la nouvelle musique depuis 35 ans ! Et c’est très bien aussi que l’ONJ sorte de son cercle et se fasse entendre d’une autre communauté musicale. Je suis très content que l’ONJ puisse interpréter à la fois du répertoire, comme il a pu le faire en rejouant Anna Livia Plurabelle d’André Hodeir l’année dernière, et présenter une création avec des technologies de pointe de l’Ircam. C’est comme cela que j’imaginais cet orchestre.
Entretien réalisé par Vincent Bessières
A propos de l'événement
Ex Machina par l'ONJdu vendredi 11 février 2022 au vendredi 11 février 2022
Maison de la Radio et de la Musique
studio 104, 116 avenue du Président Kennedy, 75016 Paris
à 22h30. www.maisondelaradioetdelamusique.fr