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Avignon / 2019 - Entretien / Tamara Al Saadi
Tamara Al Saadi, née en Irak et arrivée à Paris à l’âge de cinq ans, livre une pièce inspirée par sa propre vie où elle explore la notion d’intégration. Une pièce qui a déjà remporté plusieurs prix dont le prix des Lycéens et le prix du jury du festival Impatience.
L’origine de Place est-elle autobiographique ?
Tamara Al Saadi : Oui. Lorsque la première Guerre du Golfe a éclaté, nous étions en vacances en Europe avec ma famille. Les frontières s’étant refermées, nous sommes restés en France, pour un temporaire qui a duré. Ce que j’ai décrit dans ma pièce, c’est ce que vit un enfant quand il est étranger et ne parle pas français. Très vite, dans l’ensemble des institutions, que ce soit à l’école ou à la préfecture de police, on est confronté à notre part de différence qui n’est pas du tout admise. Très vite, il faut parler français, adopter des références culturelles françaises, etc. J’ai constaté que les mécanismes à l’œuvre n’étaient pas ceux de l’intégration mais ceux de l’assimilation. Il fallait faire un choix et non une combinaison entre deux cultures. Ces mécanismes d’assimilation induisent qu’on finit par intégrer qu’être étranger est problématique. On se bat avec cette tension. On intériorise tellement le sentiment de honte qu’on finit par adopter les mécanismes de domination et par les retourner contre soi. J’ai décidé d’écrire cette pièce parce qu’il y a quelques années, je me réveillais la nuit en ayant oublié des mots en arabe et je n’arrivais pas à me rendormir tant que je ne les avais pas retrouvés. Cette perte des mots m’a amenée à me questionner sur ce qui m’était arrivé.
L’histoire est celle d’une jeune fille, Yasmine, qui ne sait plus lire. Quelle est la portée symbolique de votre pièce ?
T.A. S. : La pièce commence par la version française de Yasmine (Yasmine 2) qui n’arrive plus à associer les lettres. Son rapport aux mots est dysfonctionnel car elle perd son rapport aux origines. Yasmine 2 coexiste avec sa version arabe, Yasmine 1, qu’elle est seule à voir et qui finit par parler en gromelot. Elle consulte un psychiatre : un enfant capable lui aussi de voir cette version arabe de Yasmine et qui comprend que Yasmine 2 est un appel au secours. Si Yasmine 1 parvient à comprendre ce que Yasmine 2 a à dire, elle saura lire de nouveau. Ce que je veux dire, c’est qu’il faut se remettre en contact avec son origine entière pour redevenir entier.
Entretien réalisé par Isabelle Stibbe
à 15h. Durée : 1h30. Tél. : 04 90 14 14 14.
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