La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Pauline Bureau

Pauline Bureau - Critique sortie Théâtre
Crédit portrait : Paul Allain

Publié le 10 mars 2012 - N° 196

Les années SIDA

Pauline Bureau adapte et met en scène La meilleure Part des hommes, de Tristan Garcia, qui retrace, de 1981 à nos jours, l’histoire du SIDA à travers l’intimité de quatre héros d’aujourd’hui.

Pourquoi avez-vous choisi d’adapter ce roman au théâtre ?

Pauline Bureau : J’ai découvert et lu ce roman par hasard, et j’ai été très touchée par les personnages, très forts et très émouvants. Et puis, cette histoire racontait les vingt-cinq dernières années, de 1981 à 2006, et j’avais envie de parler du monde d’aujourd’hui, là, tout de suite, au théâtre. J’ai commencé à travailler à l’adaptation, j’ai rencontré l’auteur, j’ai beaucoup parlé avec lui ; il était très content que son texte soit adapté au théâtre.

Quelle est l’histoire ?

P. B. : C’est celle de quatre personnages, des années 80 aux années 2000 : trois hommes et une femme, la narratrice. Il y a un jeune écrivain qui vient de province à Paris et connaît un succès foudroyant, un intellectuel de gauche qui évolue et vieillit pour se retrouver franchement à droite, un activiste qui fonde une association de soutien aux malades séropositifs et de lutte contre le SIDA, et enfin une femme étudiante, qui devient journaliste. C’est une histoire d’amour à quatre : ils s’aiment en couple, en amitié, puis se détestent. C’est, avant tout, une histoire de trahison et de fidélité, sur fond d’Histoire avec un grand H. Ce sont les années du SIDA, des traitements, du glissement d’une idéologie politique à une organisation associative : cela évoque beaucoup de choses qui ont traversé nos vies. Autour de la question de la trahison et de la fidélité en amour, se déploient d’autres interrogations, notamment politiques. Politiquement, être fidèle, qu’est-ce que ça veut dire ? Ça suppose de renoncer à quoi ? Quand on change, à quoi est-on fidèle : à soi aujourd’hui ou à soi hier ?

« Une histoire de trahison et de fidélité, sur fond d’Histoire avec un grand H. »

Comment avez-vous adapté le roman ?

P. B. : J’ai transformé le texte du roman en un texte théâtral dialogué. Le dispositif scénique est très simple : le décor permet essentiellement d’offrir des appuis de jeu aux acteurs. Il y a beaucoup de vidéo car le personnage principal, la jeune femme journaliste, filme un documentaire sur la vie des autres personnages. Les paroles intimes sont filmées par elle en direct. Sur le plateau, huit acteurs et un musicien interprètent en tout vingt-cinq personnages.

Quelle est, selon vous, l’importance du SIDA pour cette génération et cette époque ?

P. B. : Le SIDA est une maladie marquante, très présente, qui a le même temps de vie que moi. C’est une épidémie qui a été très rapide dans son évolution, ainsi que dans son traitement. Dans nos vies, ma vie, l’épidémie a pris de la place, et j’avais envie de parler de ceux qui sont morts et de ceux qui sont vivants. Je voulais aussi évoquer le combat associatif, ce qu’il a obtenu, comment des gens se sont battus très fort. J’ai aussi appris beaucoup de choses sur cette histoire récente dans laquelle existent de multiples angles morts. Le spectacle permet aussi d’interroger le rapport entre l’intime et le politique : comment les gestes politiques peuvent avoir des répercussions dans l’intimité des gens.

Propos recueillis par Catherine Robert


La meilleure Part des hommes, d’après le roman de Tristan Garcia ; adaptation et mise en scène de Pauline Bureau. Du 9 mars au 7 avril 2012. Du mardi au samedi à 20h ; le dimanche à 16h. Théâtre de la Tempête, Cartoucherie, 75012 Paris. Tél : 01 43 28 36 36.

A propos de l'événement


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