La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Paroles, pas de rôles / vaudeville

Paroles, pas de rôles / vaudeville - Critique sortie Théâtre
Légende : Un tas de bric et de broc où surgissentt une foule d’histoires et de personnages.

Publié le 10 février 2010

Les acteurs de la Comédie-Française s’essaient à la « méthode flamande » en compagnie de membres des collectifs TgSTAN, De Koe et Discordia. Sympathique mais un peu vain.

Quel capharnaüm ! Un tas de bric et de broc, accessoires en pagailles, cordages échevelés et autres bouts de portes claquées gisent pêle-mêle sur le plateau comme les reliefs éparpillés d’histoires anciennes ou à venir. Nicolas Lormeau et Coraly Zahonero, bientôt rejoints par Laurent Natrella, Julie Sicard et Léonie Simaga se présentent : ils sont comédiens et vont interpréter ce soir une trentaine de rôles, expliquent-ils au public placé en bi-frontal. Et insensiblement, cabotant au flot des mots, ils se glissent au creux de personnages, changent d’identités, de genres, de temps… ni tout à fait d’autres ni tout à fait eux-mêmes. Au gré de répliques piochées dans des classiques ou bien improvisées, les conversations effeuillent rapidement quelques sujets d’importance, sur l’amitié entre homme et femme, l’engagement et la mission politique de l’écrivain, l’acteur et son rôle ou encore le rapport entre comédie et vérité. Se superposent ainsi le réel et la représentation dans ce qui ressemble fort à un travail d’atelier, aimable mais tout de même un peu vain.
 
Un jeu naturel sans être naturaliste
 
Peut-être est-ce le format de la « carte blanche » elle-même qui a sanglé la proposition. Trois fondateurs de collectifs flamands – Damiaan De Schrijver, de TgSTAN, Peter Van den Eede, de De Koe et Matthias de Koning, de Discordia, ont été invités à « transmettre leur philosophie et leur méthode » en huit semaines dans la vénérable institution en explorant son répertoire. Les acteurs ont, chacun à leur manière, débarbouillé le jeu de toute approche amidonnée. Ils tutoient avec une aisance et une justesse déconcertantes les plus grands auteurs, déboulonnant tranquillement les codes, les artifices, l’esthétique formelle et autres trémolos de la convention dramatique. Leur naturel n’a rien de naturaliste, la fiction s’invente ici et maintenant, en interaction avec la réalité du lieu et les imprévus du moment. C’est par l’oscillation permanente et ténue entre distanciation et incarnation, entre analyse et émotion, qu’ils déploient la force subversive du théâtre. Par le trouble savamment entretenu, ils infiltrent une distance réflexive qui permet au spectateur de jouer avec eux. Voilà justement ce qui manque dans Paroles, pas de rôles / vaudeville : à force de butiner de-ci de-là des bribes de textes truffés d’improvisations, les comédiens du Français, aussi brillants soient-ils, ne parviennent pas à instaurer cette dialectique et restent dans l’exercice de style.
 
Gwénola David


Paroles, pas de rôles / vaudeville, spectacle conçu par Damiaan De Schrijver, Peter Van den Eede et Matthias de Koning, jusqu’au 28 février 2010, à 20h sauf mardi à 19h et dimanche à 16h, relâche lundi, au Théâtre du Vieux-Colombier, 21, rue du Vieux-Colombier, 75006 Paris. Rens. 01 44 39 87 00 / 01 et www.comedie-francaise.fr. Durée : 1h15.

A propos de l'événement


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