La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Classique / Opéra - Entretien

Orgue nouveau À royaumont

Orgue nouveau À royaumont - Critique sortie Classique / Opéra

Publié le 10 octobre 2007

Le dernier week-end de la saison musicale de la Fondation Royaumont se referme, le week-end du 20 et 21 octobre, avec l’inauguration de son grand orgue CavaillÉ-Coll. Un instrument exceptionnel, classÉ monument historique, construit en 1864, et « oubliÉ » dans le réfectoire de l’abbaye depuis quelques dÉcennies… CET ÉVÉNEMENT ouvre une vÉritable politique à long terme de valorisation de l’instrument, de dÉcloisonnement de son rÉpertoire et de commandes d’œuvres nouvelles.TEMPS FORT DE CETTE PROGRAMMATION, L’ORGANISTE ITALIEN FRANCESCO FILIDEI INTERPRÈTE L’INTÉGRALE DE L’ŒUVRE POUR ORGUE DE GYORGY LIGETI AVANT DE JOUER EN CRÉATION MONDIALE MANIFESTO PER LIGETI, UNE ŒUVRE DU COMPOSITEUR JACQUES LENOT (NÉ EN 1945).

Quels sentiments particuliers procure le fait d’assister et surtout de participer à la « résurrection » d’un orgue ?

Francesco Filidei : Lorsqu’on parle d’un orgue, on se sent souvent obligé d’employer des termes attachés à un contexte religieux.  L’orgue de Royaumont est placé dans un endroit  favorable à une utilisation plus libre de ses potentialités, pour se confronter à des réalités nouvelles. C’est pour cette raison que je ressens  fortement l’importance de ce moment qui, je l’espère, sera le début d’un long parcours de recherche pour tous les organistes et compositeurs.
Jacques Lenot : Il ne s’agit pas d’une résurrection, l’orgue était simplement muet depuis plusieurs années. Dès l’origine, le Cavaillé-Coll de Royaumont n’était pas un orgue d’église. En tant que compositeur pour l’instrument, j’ai surtout travaillé avec des instruments d’église. Pour moi, c’est une situation nouvelle et différente.

Parlez-nous de cet instrument…

Francesco Filidei :
Lors de ma première venue à Royaumont, en 2000, j’avais tout de suite remarqué ce grand monstre qui reposait dans un coin du réfectoire. J’avais pensé alors à d’autres monstres  endormis que j’avais connus en Italie, vieux gardiens de leur prison qu’on laissait mourir lentement. Je n’aurais jamais pensé pouvoir un jour être l’un des organistes qui l’aideraient à retrouver la parole. Il s’agit d’un instrument qui dispose d’une richesse de timbres étonnants et de couleurs uniques.
 
« La littérature organistique, si on regarde bien, n’a jamais connu de véritable rupture. »
 
Comment avez-vous abordé ce nouveau travail de composition en référence à Ligeti ?
 
Jacques Lenot : Il se trouve que  je me suis longtemps réclamé de la musique de Ligeti et c’est naturellement que l’on a pensé à moi,  car je suis un des rares compositeurs français qui se préoccupe d’écrire à la fois pour l’orgue et le piano. Mais je  pense aussi à Franz Liszt, pianiste extraordinaire qui,  progressivement en se tournant vers la religion, a intégré l’instrument « orgue » dans sa musique, sans oublier évidemment Jean-Sébastien Bach qui passait naturellement du clavecin à l’orgue. Ma démarche est différente mais il y a un lien entre Ligeti et Franz Liszt et ce lien, c’est le clavier. Il se trouve aussi que la  musique d’orgue de Ligeti est profane et que Royaumont est un lieu désacralisé.
 
Créer une nouvelle littérature pour orgue : contresens historique ou véritable défi musical ?   
Jacques Lenot : En fait, je m’inscris dans une tradition organistique qui irait de Nicolas de Grigny a Olivier Messiaen. Je n’invente rien, je continue.
Francesco Filidei : Une nouvelle littérature existe, a existé, et, je crois existera toujours, sans interruption ni contresens. De Frescobaldi à Bach, de Franck à Liszt, de Messiaen à Guillou, de Xenakis à Pesson et Lenot. La littérature organistique, si on regarde bien, n’a jamais connu de véritable rupture. Elle continuera à suivre son chemin avec de nombreux jeunes compositeurs tels que Regis Campo, Mauro Lanza ou Noriko Baba. 
 Propos recueillis par Jean Lukas


Dimanche 21 octobre à 16h30 à l’Abbaye de Royaumont (95). Tél. 01 34 68 05 50. www.royaumont.com
 

Au même programme : Musica Ricercata, pour piano de Ligeti et Avant le Jour pour piano de Jacques Lenot, interprétés par le pianiste Toros Can.

A propos de l'événement


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