La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Classique / Opéra - Entretien

Olivier Desbordes

La Traviata

Olivier Desbordes signe la mise en scène de cette production du célèbre opéra de Verdi (conçu d’après La Dame aux Camélias d’Alexandre Dumas fils), présentée l’été dernier au Festival de Saint-Céré dans une nouvelle orchestration réduite de Philippe Capdenat.

Publié le 10 février 2008

La Traviata

Olivier Desbordes signe la mise en scène de cette production du célèbre opéra de Verdi (conçu d’après La Dame aux Camélias d’Alexandre Dumas fils), présentée l’été dernier au Festival de Saint-Céré dans une nouvelle orchestration réduite de Philippe Capdenat.

« Il est frappant de noter qu’au XIXème siècle, la notion de plaisir sexuel est liée à l’infidélité, mais que cette infidélité à la cellule familiale est une sorte de fidélité à celle-ci, puisque ce même plaisir est organisé de manière à n’être pas structurellement dangereux pour la cellule familiale. En effet, le milieu des « traviatas » n’est pas épousable, il ne correspond pas aux valeurs domestiques, il se surajoute comme une gourmandise « interdite » mais tolérée. Bref on n’épouse pas la bonne, si belle soit-elle, mais on en profite sans vergogne et on la laisse… Le plaisir ne fait pas partie de la vie familiale, et il ne fait, à aucun moment, partie de la religion : le bonheur est sage, bien repassé, amidonné, strict. Les petites gens échappent à cette organisation, leur plaisir est considéré comme vulgaire et bestial. La vraie volupté est donc concédée aux femmes choisies pour ce travail par les bourgeois, comme on choisit une voiture ou une montre. Avec La Traviata, Verdi installe sur scène ces femmes que la bonne société ne veut pas voir, parce qu’elle les fabrique, en fait usage, puis leur refuse vertueusement tout rachat. Il donne grandeur tragique et sentiments à celles dont on ne voudrait voir que le corps à marchander. Il introduit ainsi à l’opéra une arme redoutable : la vraisemblance, et tient enfin ce qu’il appelle « un sujet actuel ». La censure tentera en vain de désamorcer cette bombe. On n’imagine pas aujourd’hui à quel point le quatrième acte a pu paraître violent et indécent à l’époque. A l’opéra, on meurt hors scène, par la lame ou le poison. La longue agonie de Violetta, ses toux qui la minent sont un brusque rappel de la morbidité des corps que la bourgeoisie veut sains et corsetés. On pourrait alors trouver la popularité de La Traviata étonnante, mais l’amour que Verdi porte à son héroïne, pour qui il compose sa partition la plus émouvante, transparaît à chaque mesure et gagne le coeur de tous. »

Propos recueillis par Jean Lukas


Avec Dominique Trottein (direction musicale) et les solistes, chœur et orchestre d’Opéra Eclaté.

Mardi 19 février à 20h30 à l’Avant-Seine/Théâtre de Colombes (92). Tél. 01 56 05 00 76. Places : 33 €.

A propos de l'événement


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