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Théâtre - Entretien

Nouveau chapitre, une page se tourne…

Nouveau chapitre, une page se tourne… - Critique sortie Théâtre Cergy Théâtre 95

Entretien Joël Dragutin

Publié le 25 octobre 2016 - N° 248

Le Théâtre 95 et L’apostrophe fusionnent pour créer une nouvelle scène nationale d’envergure. Une aventure de trente ans se termine pour Joël Dragutin, fondateur et directeur du Théâtre 95, auteur et metteur en scène.

Qu’est-ce qui a déclenché cette décision de fusion par les tutelles ?

Joël Dragutin : Prévu à la fin de cette saison, le départ à la retraite de Jean-Joël Le Chapelain, directeur de la scène nationale L’apostrophe, a fait émerger deux possibilités. La première hypothèse, celle que je défendais, était que je restais encore deux ans à la tête du Théâtre 95, puis transmettais le poste à un ou deux jeunes créateurs qui auraient repris le flambeau, et entretenu des relations fondées sur une complémentarité avec L’apostrophe, qui a su comme nous trouver sa place à Cergy. Scène conventionnée pour les écritures contemporaines, notre théâtre est parvenu à fidéliser et à élargir le public et s’est développé autour d’axes forts : le soutien à la jeune création, l’organisation de divers débats et conférences sur des enjeux de société, et une solide implantation locale. Cette hypothèse a été privilégiée jusqu’à cet été. Puis, suite à un audit réalisé à la demande de la communauté d’agglomération, les tutelles ont finalement estimé que cette solution risquait de fragiliser les deux structures, étant donné les difficultés à obtenir de nouveaux crédits. Ils ont opté pour une seconde hypothèse : la fusion des deux lieux, en arguant que les perspectives de développement étaient ainsi beaucoup plus importantes, cette nouvelle scène nationale du Grand Ouest devenant un “poids lourd“ au même titre que les scènes de Créteil et Bobigny.

Comment va s’opérer cette fusion ?

J. D. : Les équipes et les budgets seront regroupés, créant ainsi une super structure unissant le Théâtre 95 et le Théâtre des Louvrais à Pontoise, tandis que les locaux de L’apostrophe seront récupérés par le Conservatoire à rayonnement régional. Le budget va augmenter pour atteindre plus de cinq millions d’euros. Les tutelles, et notamment la DRAC, ont annoncé une participation accrue, le nombre de places s’élevant de 650 à plus de 1100. Un appel à candidature est lancé pour le recrutement d’un nouveau directeur – ou une nouvelle directrice – qui sera nommé au printemps et officiellement en poste à partir de septembre 2017.

« Notre plus authentique légitimité, c’est le public. »

Quid de votre parcours ?

 J. D. : C’est un grand chamboulement qui met fin à une aventure de trente ans. Je deviendrai compagnie en résidence au sein de la scène nationale pour une durée de trois ans à partir de janvier 2018, à raison d’une création par an, produite ou coproduite par la scène nationale. Au départ, j’avais préfiguré le théâtre dès 1985, avant de le fonder en 1989. C’est à cette date qu’il a ouvert à temps plein. Tout a commencé dans un préfabriqué que l’on a peint nous-mêmes. Nous avions une scène de quatre mètres de profondeur et une petite salle de 90 places, ensuite agrandie. Après extension, les travaux ont permis d’ouvrir en 2012 une seconde salle et un atrium. Notre dernière présentation de saison a été chargée d’émotions ! Nous avons reçu de nombreux témoignages d’artistes, d’associations et de gens du public. Notre plus authentique légitimité, c’est le public. La communauté d’agglomération, présidée par Dominique Lefebvre, tenait à ce que je poursuive une activité de création afin d’assurer une continuité. Nous assurons la programmation jusqu’en décembre 2017. Avec plusieurs jeunes artistes – l’auteure Marion Aubert, Jean-Baptiste Delcourt qui crée Par les Villages de Peter Handke, et bien d’autres ; et diverses conférences-débats… Les tutelles ont décidé que cette nouvelle scène nationale, fortement implantée dans le territoire, poursuivra le soutien à la jeune création, ainsi que la tenue de conférences-débats.

Quelle est la création que vous présenterez la saison prochaine ?

J. D. : Je travaille toujours sur les mythologies contemporaines, et cette prochaine création explore le thème de l’argent relié aux affects. Une sorte de matière fluide qui s’insinue dans tous les rapports humains – sociaux, politiques mais aussi familiaux, amicaux et amoureux. Les rencontres sur des sites payants concernent aujourd’hui plus d’une personne sur deux ! Les gens sont au service de l’économie et non pas l’inverse. Six comédiens incarnent des personnages qui parlent de travail, d’amour, de toutes sortes de choses, et même s’ils ne parlent pas d’argent, celui-ci demeure omniprésent. En général, les gens qui en ont le plus sont ceux qui en parlent le moins. Je suis en cours d’écriture pour ce projet.

Qu’avez-vous prévu pour cette fin de saison particulière ?

J. D. : Nous organisons un week-end festif du 12 au 14 mai 2017, une manifestation intitulée L’Art et moi, coordonnée par Anita Weber. Nous invitons pour cela les gens de Cergy-Pontoise et d’ailleurs à raconter une rencontre marquante avec une œuvre d’art qui les a profondément touchés – livre, tableau, musique, monument… Tout le monde est touché par l’art, même ceux qui pensent ne pas l’être. Nous invitons parallèlement des artistes – comédiens, musiciens, peintres, vidéastes… – à faire écho à ces histoires par diverses interprétations. Les inscriptions sont ouvertes sur notre site ! C’est une belle conclusion qui fait du public celui dont on parle…

Propos recueillis par Agnès Santi

 

A propos de l'événement

Nouveau chapitre, une page se tourne…
Théâtre 95
Allée du Théatre, 95000 Cergy, France

Tél : 01 30 38 11 99. Site : theatre95.com

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