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Danse - Critique

« MOMO » ou la rencontre de 2 chorégraphies séparées d’Ohad Naharin et d’Ariel Cohen

« MOMO » ou la rencontre de 2 chorégraphies séparées d’Ohad Naharin et d’Ariel Cohen - Critique sortie Danse Montpellier
Crédit : Ascaf MOMO d’Ohad Naharin, Ariel Cohen et la Batsheva Dance Company

Festival Montpellier Danse / Chorégraphie Ohad Naharin, Ariel Cohen, Batsheva Dance Company

Publié le 22 mai 2025 - N° 333

Une pièce absolument poignante, qui fait se rencontrer deux chorégraphies créées séparément sur le plateau, l’une d’Ohad Naharin, l’autre d’Ariel Cohen, et des danseurs de la Batsheva Dance Company.

La lumière n’est pas encore éteinte quand quatre hommes, allure martiale à souhait, torses nus et pantalons cargo, entrent sur le plateau. Ils arpentent l’espace en unissons parfaits, comme une unité prête au combat, réglée comme du papier à musique, paraissant sans affects. Et, peut-être pour la première fois dans un spectacle de la Batsheva, la guerre est dans toutes les têtes. Viennent alors, un par un, sept danseurs en costumes de ballerines revisités et totalement « gender fluid » dans les roses et or, dont la gestuelle, empreinte de la technique Gaga mise au point par Ohad Naharin, semble vouée à se déliter dans des dislocations du corps entier. Les deux groupes cohabitent sur le plateau. Et si au premier abord tout paraît simple, d’un côté les soldats, de l’autre les artistes chorégraphiques, aux uns l’ordre militaire, aux autres le chaos et la liberté, tous les clichés de la masculinité s’opposant à l’originalité personnelle, tout s’avère plus compliqué et surtout plus subtil.

Scènes stupéfiantes

La musique, en mineur, tirée principalement de l’album Landfall de Laurie Anderson avec le Kronos Quartet, et le mouvement du groupe des « danseurs.ses » qui s’escrime, sous de beaux éclairages dorés, à rassembler tous leurs membres en un tout cohérent, semble surtout engagé dans une bataille perdue d’avance, car toujours quelque chose échappe à cette unité personnelle rêvée…  De l’autre justement, le collectif symbolisé par le quatuor en marche, tout en structurant l’ensemble car c’est lui qui impose son rythme et hypnotise le regard, paraît prendre des libertés dans de petits détails. Tandis que les autres, titubant, tremblants, ou enchaînant des arabesques désespérées et malgré leurs différences chorégraphiques comme physiques, donnent l’impression d’un groupe d’âmes en peine, poignant dans sa volonté de bouger dans tous les sens, prêt à se démantibuler. Comme si, face à cette fin du monde annoncée, il avait déjà abandonné la partie. Et même si on distingue ce qui vient de Naharin (le quatuor) et ce que les danseurs et Ariel Cohen en ont fait, la totalité de la performance viscérale, explosive, et parfois si étrange avec ses torsions et ses trémulations, emporte tout avec elle. On se rappellera que cette pièce impressionnante a été créée en décembre 2022 !

Agnès Izrine

A propos de l'événement

MOMO
du samedi 21 juin 2025 au dimanche 22 juin 2025


le 21 à 20h, le 22 à 17h et 20h.

Tél. : 04 67 60 83 60.

Durée : 1h10. Spectacle vu à Chaillot Nomade à La Villette.

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