Mlle Julie # meurtre d’âme de Moni Grégo, d’après August Strindberg, mise en scène de Roxane Borgna
Roxane Borgna met en scène la réécriture [...]
Dans un dispositif mêlant comédiennes amatrices et professionnelles, Métamorphoses évoque les violences faites aux femmes à travers l’œuvre d’Ovide, dans un spectacle dont la beauté s’épanouit crescendo.
L’Iliade mise en scène par Luca Giacomoni avait frappé les esprits. Réunissant des comédiens professionnels, des détenus et d’anciens détenus récemment libérés autour du texte d’Homère, le spectacle bousculait l’idée d’un théâtre de la simple représentation. Métamorphoses réédite l’effet. Sur scène, Diariatou Basse, Hadassah Njengue et Sylvie Tojba – toutes trois rencontrées via la Maison des femmes de Saint-Denis, établissement social qui accueille des « femmes vulnérables ou victimes de violence » – traversent quelques morceaux choisis des Métamorphoses d’Ovide, en compagnie de trois comédiennes et d’une chanteuse lyrique. Des morceaux choisis parmi l’abondance de récits évoquant dans l’œuvre du poète latin la violence masculine, divine ou humaine, qui s’exerce aux dépens du sexe dit faible. C’est pêle-mêle, entre autres, l’histoire de Daphné transformée par son père en laurier pour qu’elle échappe au harcèlement sexuel d’Apollon, celle des sœurs Philomèle et Procné qui se vengent du viol de la première par Térée en servant à celui-ci son fils à manger, celle d’Arachné changée en araignée par Junon pour avoir tissé mieux qu’elle, ou encore celle de Ios, que Jupiter métamorphose en génisse pour la faire échapper à la jalousie de son épouse. Des histoires qui, au-delà de leur beauté mythologique, disent combien les femmes sont soumises à la violence du désir masculin et à l’ordre qu’il a su imposer.
La question du traitement esthétique de la violence
L’expression de cette violence monte crescendo dans le spectacle. Contenue, ravalée, au début, elle s’exprime de manière absolument superbe dans une scène finale, qui à elle seule vaut le détour, quand s’exprime la souffrance féminine dans une superbe succession de tableaux construits autour de la renversante Clémence Josseau. Le spectacle avait démarré plus laborieusement, un peu figé, peinant à faire naître des situations et des images. C’était une première pour le spectacle et pour ces trois comédiennes issues de la Maison des Femmes, visiblement impressionnées, au salut aussi émues qu’émouvantes. Petit à petit, la machine théâtrale s’est mise en route, plaçant en son centre la question du traitement esthétique de la violence. Le choix de faire figurer sur scène des femmes qui l’ont réellement éprouvée créant un effet de réel qui petit à petit devait se mêler à la fable. Et peu à peu, à coups de pilons sur une planche, de poulpe découpé, ou de métamorphoses animales, dont celle formidable de l’arachnéide Laetitia Eïdo, à force de mélange des langues, des langages – visuel, musical, narratif -, l’univers dessiné par Luca Giacomoni s’est développé, a laissé s’exhaler une beauté qu’on aurait aimé voir se développer plus longtemps encore.
Eric Demey
à 20h, le dimanche à 16h, relâche le lundi. Tel : 01 43 28 36 36. Durée : 1h20.
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Avec Louis Arene (Edouard), Samir M’Kirech [...]