« Un soir chez Boris », la yourte d’Olivier Debelhoir continue de parcourir le territoire
Depuis 2015, la yourte d’Olivier Debelhoir [...]
Une pièce sous influence de Martin Legros met en scène, avec un humour aussi ravageur que la justesse de l’écriture, la résistance de la mémoire et du traumatisme face à un départ inéluctable. Une réussite servie par la compagnie La Cohue et quatre comédiens magistraux.
Une femme en tablier maculé de sang et un homme affublé d’un costume de boîtes de conserve que l’on croirait sortis du Magicien d’Oz titubent un peu de délire. Aucun crime n’a été commis, mais on pressent qu’un drame gît sous ce retour de carnaval dans un intérieur à peine meublé de cotillons, d’un piano et d’un lustre. Anna et Matthias finissent de déménager et on devine que le départ n’est pas facile. Il est la conséquence, longtemps différée par Anna, du décès de leur fille lors d’un accident de voiture trois ans plus tôt. À la veille de tourner une page dans leur vie, celle-ci a décidé d’inviter les nouveaux propriétaires, Claire et Lukas, déguisé en Batman. Avec un titre qui fait référence à Cassavetes – dont un autre film, Opening night, est cité dans la bataille de noms à laquelle s’adonnent les hôtes –, Une pièce sous influence met en scène, comme le cinéaste américain, une femme qui, perdant pied face au réel, entraîne aussi son entourage dans des impairs et des décalages lexicaux dignes de Gros-Câlin de Gary, où l’absurde involontaire, qui passe parfois pour la surdité de l’ivresse, permet d’échapper à la brûlure du traumatisme.
Quiproquos jubilatoires et émouvants
Avec beaucoup de sensibilité, Martin Legros dévoile le poids de la mémoire et d’une chambre, celle de l’enfant disparu, que Anna essaie désespérément de conserver comme un sanctuaire. La succession des quiproquos qui font tourbillonner les bienséances, parfois voilées par le vacarme de la batterie, est calibrée avec une précision aussi jubilatoire qu’émouvante – à l’exemple de la séquence sur le catholicisme, glissant sous le grotesque quelque leçon de vie. Au fil des saynètes, elle esquisse de saisissants instantanés psychologiques où la vérité du sentiment se confond avec le plaisir du théâtre – la confidence entre les deux femmes, l’aveuglement du bon père de famille heureux qui persiste à feuilleter l’album, sans se douter de la souffrance qui sourd. Avec un Nocturne de Chopin, c’est la pudeur qui a le dernier mot, sous des lumières tamisées. Une magistrale réussite sur les blessures qui résistent face au temps qui passe.
Gilles Charlassier
à 10 heures. Relâche les 8 et 15 juillet. Tél. : 04 84 51 20 10. Durée : 1h35.
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