La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Danse - Entretien Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault

M. et Mme Rêve

M. et Mme Rêve - Critique sortie Danse Paris Le Grand Rex
Crédit : Pascal Elliott Légende : Danse et technologies de pointe au rendez-vous de cette création signée Pietragalla-Derouault.

Grand Rex
Chorégraphie Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault

Publié le 23 janvier 2014 - N° 217

Le nouveau duo créé par le tandem Pietragalla-Derouault invite l’univers d’Eugène Ionesco à croiser la danse et les nouvelles technologies. Les chorégraphes expliquent leur démarche. 

« Suivre Ionesco qui pense la vie en trois dimensions, le monde comme une virtualité. » J. D. 

« Nous avons en nous, dans le corps, une synthèse de plusieurs techniques qui créent notre langage. » M-C P.

Qu’entendez-vous par « Théâtre du Corps », qui est le nom donné à votre compagnie ? Qualifie-t-il votre démarche ?

Marie-Claude Pietragalla : Ce terme définit notre démarche, à travers une théâtralisation du corps. Nous travaillons sur le conscient mais aussi sur l’inconscient, sur la façon dont sont véhiculés des moments de vie. On se base évidemment sur nos propres histoires, mais aussi sur nos danseurs, leurs origines, leurs cultures, tout ce qui constitue l’être humain. On questionne l’histoire, la mémoire collective, ou même notre intimité profonde.

Julien Derouault : Nous ne sommes pas dans quelque chose de conceptuel ou d’abstrait, mais toujours dans une gestuelle qui va évoquer une poésie, liée soit au thème du spectacle, soit plus généralement à ce qui constitue l’être humain. Je dis toujours que l’on regarde la danse avec un autre niveau de conscience, et d’une certaine manière c’est comme cela que l’on peut raconter des histoires au public, et, parfois avec des choses très intimes, tendre vers l’universel.

Dans cette nouvelle pièce, l’aspect onirique permet d’installer une poésie, d’aller vers une grande liberté par rapport à la narration. Comment est-ce construit ?

M-C P. : Nous sommes partis d’une phrase d’Eugène Ionesco qui nous a semblé incroyable. Il dit : « ce que nous rêvons est réalisable ». Or il rêvait les histoires avant de les écrire. Le rêve crée la réalité… Qu’est ce qui est concret, qu’est-ce qui est rêvé, fantasmé ? Les frontières sont parfois très minces. C’est sur cette base que l’on a créé l’histoire de ces deux personnages, échappés de la tête de l’auteur, et qui vont avoir leur propre vie, suivre leur propre chemin. On a voulu s’imprégner de son œuvre dans le sens où son théâtre demande énormément d’imagination au metteur en scène, avec des personnages qui s’envolent, des sols qui s’effondrent, des explosions, des femmes à plusieurs visages, des choses surréalistes. Nous avions commencé grâce à Marco Polo à travailler sur un univers animé, et nous avons eu envie de relier cet univers surréaliste avec la haute technologie. D’où cette collaboration avec Dassault Systèmes et leurs ingénieurs, car nous voulions quelque chose de presque surnaturel. Il ne s’agissait pas de se retrouver dans un espace ordinaire, avec des projections derrière nous, mais d’être complètement immergés dans l’image. On a imaginé une boîte blanche, qu’on a appelée « la boîte magique », que baigne cette technologie de pointe.

Dans ce dispositif immersif, comment faire exister la danse ? De quelle danse partez-vous ?

J. D. : Nous avons tout de suite alerté les ingénieurs à ce sujet. J’ai toujours le regret de voir que dans les démonstrations technologiques, la danse est complètement absorbée par l’image ou qu’elle ne sert parfois que de support à l’image. Ce n’est absolument pas ce que l’on voulait faire. Il ne s’agissait pas de faire une énième pièce avec les nouvelles technologies, mais de suivre Ionesco qui pense la vie en trois dimensions, le monde comme une virtualité. Avec les ingénieurs, nous avons travaillé une interaction entre le corps vivant et les images, en synchronisant les musiques et les mouvements, à partir d’un scénario extrêmement précis.

M-C P : Il faut également citer Laurent Garnier pour la création musicale, qui a lui aussi mis son travail au service de la danse. Avec Julien, nous pensons la danse plurielle. Nous avons pratiqué beaucoup de techniques – la danse classique, contemporaine, l’acrobatie, le hip hop. Nous sommes très traversés aussi par le théâtre. Nous avons en nous, dans le corps, une synthèse de plusieurs techniques qui créent notre langage. Et nous avons un double regard, féminin et masculin sur le corps, avec des parcours différents.

 

Propos recueillis par Nathalie Yokel

A propos de l'événement

M. et Mme Rêve
du mardi 11 février 2014 au dimanche 29 juin 2014
Le Grand Rex
1 boulevard Poissonnière, 75002 Paris

Le Grand Rex, 1 boulevard Poissonnière, 75002 Paris. Du 12 au 29 mars 2014. Réservations www.fnac.com Le 11 février à CHelles, le 28 février à Fontenay-le-Comte, le 1er avril à Montpellier, du 3 au 5 avril à Lyon, le 16 avril à Toulouse, les 18 et 19 avril à Marseille, le 23 avril à Saint-Benoît la Hune, le 29 avril à Clermont-Ferrand, le 3 mai à Nice, le 6 mai à Dinan, le 16 mai à Nantes, le 23 mai à Strasbourg, les 28 et 29 juin à Bruxelles.
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