La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Lisa Wurmser

Lisa Wurmser - Critique sortie Théâtre
Crédit Photo : Xavier Lambours

Publié le 10 novembre 2007

Marionnettes, masques et machines à rêves…

Après Marie des Grenouilles, Lisa Wurmser s’attache à Pinok et Barbie du même Jean-Claude Grumberg, une fable politique sur la profonde injustice des rapports Nord/Sud et sur la condition inhumaine des enfants soldats. Avec tendresse, ironie et poésie.

Quelle est l’idée maîtresse de la pièce Pinok et Barbie ?

Lisa Wurmser :
L’auteur Jean-Claude Grumberg développe l’opposition entre « les enfants qui ont trop de tout et les enfants qui ont trois fois rien, rien à manger, rien à boire, rien à espérer ». Paradoxalement, ceux qui se rendent compte de la misère des enfants en Afrique – notamment, des enfants soldats -, ce sont les jouets. D’où la prééminence des objets sur la scène – la structure essentielle du spectacle – des jouets mécaniques, des jouets actionnés, des jouets qui bougent. Beaucoup d’enfants parlent dans la pièce, des enfants soldats, des jouets, des poupées, des ours …

Le spectacle est une critique acerbe du partage des richesses entre le Nord et le Sud de la planète.

L. W. :
C’est une fable d’actualité à l’humour grinçant, elle se passe à la période de Noël qui se prête à la problématique des surplus dans les sociétés occidentales, surplus de jouets et de consommation, un engorgement oppressant. On pense aux missions humanitaires et à leurs faux échanges ; des poupées barbies en plastique sont déversées en Afrique tandis que les jouets du continent noir fabriqués sur place n’affleurent qu’à peine en Europe.

« L’illusion et la machinerie sont au cœur de la scène. »

L’opposition est flagrante entre les jouets occidentaux et les enfants soldats qui disposent, eux, de vrais jouets, bazookas, mitraillettes, kalachnikovs.

Le sujet et la forme sont ici particulièrement indissociables.
 

L. W. :
Comme un peu dans Les Enfants et les sortilèges de Ravel, la pièce fait parler les jouets. Les objets sont animés et les êtres humains parfois inanimés. Des marionnettes, des masques et des ombres peuplent la scène. Ce travail sur le vivant et l’inanimé fait référence à l’esprit de Kantor, sans la gravité et avec beaucoup de facéties. Au début de son texte, Grumberg précise : « En hommage aux poupées, aux pantins, aux marionnettes, aux Intermittents du spectacle et au Pinocchio de Collodi. » Ce spectacle de mise en abyme de la manipulation oblige à des solutions de théâtre. L’illusion et la machinerie sont au cœur de la scène.

Votre équipe se prête dans la souplesse à ce jeu de merveilles.

L. W. :
Les cinq acteurs, Pascale Blaison, le magicien Thierry Collet, Juliette Roudel, Diana Sakalauskaïté et Marius Yelolo, sont interprètes, manipulateurs et marionnettistes. Pascale Blaison a conçu et sculpté les enfants, les marionnettes et les masques. Olivier de Logivière et Fabien Tuizat ont conçu les machines à rêver. Cet univers onirique repose sur une belle unité plastique.

Propos recueillis par Véronique Hotte


Pinok et Barbie

De Jean-Claude Grumberg, mise en scène de Lisa Wurmser, du 8 au 14 novembre 2007, les 8, 9, 10 et 13 à 20h30, le 11 à 17h, à la Comédie d’Amiens 62 rue des Jacobins 80 000 – Amiens Tél : 03 22 22 20 20   Texte publié à Actes-Sud/Heyoka

A propos de l'événement


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