
Lucie Berelowitsch met en scène « Vanish », un texte de Marie Dilasser
Dans Vanish, écrit par Marie Dilasser en […]
La metteuse en scène et directrice du Préau – Centre dramatique national de Normandie-Vire Lucie Berelowitsch adapte avec une fibre poétique éclairée le chef-d’œuvre inachevé de Luigi Pirandello. Spectacle hybride, l’adaptation profite également de l’exceptionnelle présence scénique et musicale du cabaret punk ukrainien Les Dakh Daughters.
Faire vibrer toute la puissance allégorique de l’œuvre, de cette fable fantastique aux accents mythologiques dédiée « à la tragédie de la poésie au milieu de ce brutal monde moderne », est l’ambition que Lucie Berelowitsch a faite sienne. La réussite de cette appropriation tient d’abord à l’attention accordée à la multiplicité des possibles offerts par la pièce, dont l’argument de base tient de la mise en abîme théâtrale. Une troupe, réduite à sa plus simple expression, décimée, est à la recherche du lieu qui pourrait l’abriter pour répéter sa nouvelle création. Elle échoue à La Villa, île fantasmatique habitée par des marginaux ayant fait le choix de la poésie et de l’imagination contre celui de la nécessité, ces insulaires, que d’aucuns qualifieraient d’idéalistes, veulent croire sans attendre de voir. Au cœur du propos, la réflexion sur ce qu’est le théâtre, excédée de toutes parts, résonne dans ses déclinaisons éthiques et politiques, au-delà même du contexte effarant de la guerre actuelle qui ravage l’Ukraine. Que sommes-nous prêts à sacrifier à la peur et à ses représentations, à « ces géants de la montagne » qui en sont la forme poétique pirandellienne ?
Des tableaux d’une poésie folle
Lucie Berelowitsch entretient, depuis sa création, des liens privilégiés avec la formation née à l’initiative du directeur du Théâtre Dakh à Kiev, Vlad Troitskyi, il y a une dizaine d’années. Elle fait des comédiennes et musiciennes du groupe des Dakh Daughters les habitantes de La Villa imaginée par Pirandello. Et l’on ne saurait après les avoir vues et entendues en imaginer d’autres. Leur prestation d’une poésie folle répondant au fabuleux de l’inspiration pirandellienne est en tout point saisissante. Mêlant diverses sources d’inspiration dans cette veine du « freak-cabaret » qui leur est propre, leurs créations musicales et vocales inédites tiennent du sortilège. Sous le charme nous tiennent également les costumes baroques imaginés par Caroline Tavernier, comme l’unique décor mouvant des trois actes de la pièce, celui de cette Villa aux vrais faux airs de palais marqué par le passage du temps, conçu par le scénographe Hervé Cherblanc. Un bémol : l’exceptionnalité de la performance des Dakh Daughters mériterait que l’on trouve peut-être le moyen de rehausser celle des autres comédiens Jonathan Genet, Marina Keltchewsky, Thibault Lacroix, Baptiste Mayoraz et Roman Yasinovskyi, qui, pris dans un tel maelström, peinent à donner une vraie consistance à leur rôle.
Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens
Lucie Berelowitsch met en scène « Vanish », un texte de Marie Dilasser
Dans Vanish, écrit par Marie Dilasser en […]
Le jeudi et le vendredi à 20h30, le samedi à 19h. Durée : 1h50 (en français et ukrainien, surtitré en français). Tél : 02 31 66 66 26.
Spectacle vu au TNBA (Théâtre National de Bordeaux en Aquitaine) le mercredi 11 janvier 2023.
Tournée d’octobre 2023 à février 2024 (en cours de montage) à Limoges / Théâtre de l’Union – CDN du Limousin, Poitiers / Le Meta – CDN de Poitiers Nouvelle-Aquitaine, Bayonne / Scène Nationale de Dieppe, Evreux / le Tangram – Scène Nationale d’Evreux, Thionville / NEST – CDN transfrontalier de Thionville-Grand Est.
Second volet après Familie d’une Trilogie de [...]