Chalon dans la rue
Le festival transnational des artistes de la [...]
Classé jeune public mais passionnant pour tous, Le manuscrit des chiens II suit l’errance d’un vieux chien des fjords qui rencontre dans les montagnes une jolie chienne des villes. Une fable canine à ne pas japper.
En Norvège, il semble que la frontière entre le théâtre jeune public et celui destiné aux plus grands soit bien plus poreuse qu’en France. Ici, c’est en catégorie jeunesse chez l’Arche Editeur que les trois Manuscrits des chiens de Jon Fosse ont été édités. Ces trois textes se nomment ainsi parce qu’ils ont pour point commun d’avoir des chiens comme personnages principaux. Christophe Laluque a décidé de s’en emparer au rythme de leurs publications récentes en France. Ainsi, bien que deuxième volet dans l’ordre de l’écriture, Quelle merveille ! vient clôturer la trilogie des trois Manuscrits qu’il a montés avec l’Amin-Théâtre, compagnie aux manettes de la Friche des Lacs de l’Essonne à Viry-Chatillon. Le texte de Jon Fosse parle de l’amour, de la mort, de l’amitié, du désir qui décline et du désir qui croît, de la timidité de la jeunesse mais aussi des peurs sénescentes et de la vie qui va, en somme de thématiques multiples qui traversent les âges, dans une langue à la fois simple et élaborée, si bien que le spectacle semble pouvoir être vu de mille manières différentes selon la personne qui chausse les lunettes de spectateur.
Paysages nordiques et atmosphère fantastique
D’ailleurs, même les personnages changent d’âge dans le récit. Ainsi, les deux chiennes de la ville qui visitent la campagne norvégienne sont tout d’abord très belles et toute jeunettes, puis tout d’un coup défraîchies. Et leur périple à travers fjords et forêts va chambouler la vie du chien Olav, qui initialement semblait aux abois mais va ainsi trouver un second souffle. Sur un plateau nu, au sol noir laqué fendu de deux traits blancs, et sur fond de vidéo mystérieuse évoquant cieux tourmentés et fonte des neiges, Christophe Laluque déploie la fable merveilleuse de Fosse dans une atmosphère dépouillée et évocatrice, à l’univers sonore soigné, aux lumières habiles, qui laissent sourdre et se fondre ensemble paysages nordiques et atmosphère fantastique. Écrite sous forme de monologue, l’histoire est racontée et incarnée – glissements fluides et incessants d’un registre à l’autre – par quatre comédiens qui ne font pas les chiens mais ne se prennent pas non plus complètement pour des hommes. Ménageant toujours l’entre-deux, le flou, la suggestion, les intentions intelligemment dessinées de la mise en scène laissent entendre les multiples échos que déploie le texte et construisent au final un spectacle tout à fait réussi.
Eric Demey
Du 4 au 15 juin, scolaires en semaine, le samedi à 18h, le dimanche à 16h. Tél : 01 45 86 39 24.
Le festival transnational des artistes de la [...]