La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Le Maître et Marguerite

Le Maître et Marguerite - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Tempête
Igor Mendjisky © D.R

Théâtre de la Tempête / d’après Mikhaïl Boulgakov / mes Igor Mendjisky

Publié le 23 avril 2018 - N° 265

Directeur de la compagnie Les Sans Cou, Igor Mendjisky adapte Le Maître et Marguerite de Mikhaïl Boulgakov. Un chef d’œuvre hybride et foisonnant, dont il tient à traduire la liberté. Le cri.

Après les créations collectives J’ai couru comme dans un rêve (2012) et Idem (2015), votre adaptation du Maître et Marguerite marque un retour au texte, initié en 2016 avec Notre crâne comme accessoire. Cela change-t-il beaucoup votre processus de travail habituel ?

Igor Mendjisky : Au lieu de construire l’histoire entièrement au plateau, avec les comédiens, l’adaptation requiert ici un travail solitaire en amont. Mais je ne renonce pas à l’improvisation, qui fait partie de l’identité des Sans Cou. En septembre dernier, j’ai pu tester mon adaptation avec l’équipe et la faire évoluer avec eux. Il est important pour moi que le texte final porte la marque de l’écriture au plateau, même si nous restons très fidèles à l’écriture sublime de Mikhaïl Boulgakov, qui me nourrit depuis très longtemps.

Sublime et grotesque, familier et fantastique… En plus d’être d’une incroyable densité en matière de scènes et de personnages, Le Maître et Marguerite allie les contraires. Pourquoi avoir voulu relever ce défi au plateau ?

I.M : Ce roman est un feu d’artifice, qui dit beaucoup des conditions d’écriture de Boulgakov. Et qui n’a rien perdu de sa force subversive. Menacé par la censure, celui-ci savait en effet que son livre ne serait pas publié de son vivant. D’où sa grande liberté, qu’il me tient à cœur de porter avec les moyens du théâtre.

« Je veux que le spectateur soit placé au cœur de la folie de Boulgakov. »

La mise en abyme est un motif récurrent de votre travail. Quels échos au milieu théâtral actuel trouvez-vous chez Boulgakov ?

I.M : La partie du roman qui concerne le Diable, en visite sur terre sous le nom de Woland, est pour moi un cri anticonformiste qui correspond à ma vision du théâtre. Au moment où la Russie et l’Europe connaissent une montée du conservatisme, où des artistes comme le metteur en scène Kirill Serebrennikov sont arrêtés pour leurs idées, où en France les artistes sont de plus en plus contraints d’adopter des formats précis, commerciaux, il est important de déborder des cadres existants.

D’où votre choix d’un dispositif trifrontal ?

I.M : Tout à fait. Je veux que le spectateur soit placé au cœur de la folie de Boulgakov. Le jeune auteur Ivan, que j’incarne, s’adressera ainsi très directement au public. Et je pourrai réaliser un fondu-enchaîné à partir des trois fils narratifs qui composent le livre : celui qui décrit la succession de catastrophes à Moscou dans les années 30, l’histoire du Maître enfermé pour avoir écrit un roman sur Ponce Pilate, et celle de son amour avec Marguerite. Car tout doit être fluide. Un peu comme Les Mille et Une Nuits, ce récit à tiroirs doit nous emporter.

Propos recueillis par Anaïs Heluin

A propos de l'événement

Le Maître et Marguerite
du jeudi 10 mai 2018 au dimanche 10 juin 2018
Théâtre de la Tempête
route du Champ de Manœuvre, 75012 Paris, France

du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h. Tel : 01 43 28 36 36. www.la-tempete.fr. Également du 6 au 27 juillet à Avignon au 11• Gilgamesh Belleville, du 6 au 9 mars au Grand T à Nantes, les 12 et 13 mars au Théâtre Firmin-Gémier – La Piscine à Antony…

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