Emmanuel Demarcy-Mota investit La Grande Magie d’Eduardo De Filippo
Depuis longtemps intéressé par le théâtre [...]
Le metteur en scène Philippe Person fait remonter sur les planches son adaptation de l’une des pièces les plus fameuses du répertoire vaudevillesque, signée par Georges Feydeau. Teinté années soixante, resserré sur six personnages, ce Dindon, dans l’ensemble un peu pâle, est servi par une distribution aguerrie.
La pièce est regardée comme un modèle du genre. Elle couronne le génie comique du roi du vaudeville qui, prenant pour cible de prédilection la bourgeoisie du Second Empire et ses mœurs conjugales, invente une véritable poétique de la bêtise, de l’absurde et du ravissement à partir d’un motif comique des plus classiques : l’adultère. Pontagnac, qui, in fine, s’avèrera être celui que l’expression populaire « le dindon de la farce » a élevé au rang de stéréotype, poursuit Lucienne de ses assiduités. Celle-ci, qui n’est autre que la femme de l’une de ses anciennes connaissances, René Vatelin, ne se déclare prête à céder à ses avances qu’à la condition que son mari lui soit infidèle. Or, à sa grande surprise, ce dernier l’est. S’ensuit une avalanche de situations plus rocambolesques les unes que les autres dans un époustouflant chassé-croisé d’amants et de maîtresses subtilement orchestré. Au cœur de l’intention du metteur en scène, dont on sait le goût pour la fantaisie et la drôlerie, il y a une fascination pour cet hilarant morceau de bravoure dramatique.
Une langue toujours aussi jubilatoire
L’intrigue, d’une complexité rare, faite de multiples quiproquos et de savants malentendus mis au service d’une implacable mécanique dramaturgique, repousse sans cesse les limites du crédible. Et du rire. Pour libérer toute la puissance comique de cette pièce d’anthologie, il faut engager une adhésion sincère au plus ahurissant. Cela peut-il avoir lieu sans dégager le motif principal, l’adultère, de sa gangue historiquement datée ? Transposer le propos dans les années soixante, comme en témoignent notamment les motifs peints sur le rideau de fond de scène et les costumes, peut-il suffire à revitaliser la pièce ? Au final, tout repose, ou presque, sur la langue jubilatoire du dramaturge dont on savoure avec toujours autant de délice les trouvailles stylistiques, les éloquentes onomatopées et les répliques inénarrables. Sur scène, les six comédiens doués et expérimentés que sont Florence Le Corre, Jil Caplan, Philippe Maymat, Philippe Calvario, Pascal Thoreau, et Philippe Person lui-même, font chacun de leur mieux avec générosité. Manque au jeu cette petite étincelle qui nous permettrait de franchement « glouglousser ».
Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens
Du mardi au samedi à 21h, les dimanches à 18h. Tél : 01 45 44 57 34. Durée : 1h35.
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