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Danse - Critique

« Kill me » de Marina Otero, un spectacle brut, violent et à la fantaisie débridée

« Kill me » de Marina Otero, un spectacle brut, violent et à la fantaisie débridée - Critique sortie Danse Paris Théâtre du Rond-Point
Kill me de Marina Otero. © Sofia Alazraki

Théâtre du Rond-Point / Chorégraphie Marina Otero

Publié le 27 août 2024 - N° 324

Après Fuck me et Love me, Marina Otero a créé au Printemps des Comédiens en juin dernier Kill me, troisième volet d’un triptyque faisant partie d’un projet autofictionnel qu’elle prévoit de poursuivre jusqu’à sa mort. Un spectacle brut, violent et à la fantaisie débridée.

Des images capturées par le téléphone portable de Marina Otero défilent sur grand écran alors qu’entre confession et souci didactique sa voix off nous explique la genèse de Kill me : le succès et les tournées internationales, la relation stable avec un conjoint, et pourtant des poussées auto-agressives et une angoisse persistante. Puis après la rupture douloureuse avec ce compagnon qui s’avère finalement toxique, le diagnostic psychiatrique : borderline. Pour survivre à tout ça, la nécessité d’en faire un spectacle dont le sujet se situe entre la passion amoureuse et la maladie mentale, où les acteurs et actrices sont eux aussi en lien avec les troubles psychiques : un danseur schizophrène, trois danseuses borderline – dont la chorégraphe –, une autre enfant de lacaniens, une musicienne bipolaire.

« Exploser en mille éclats d’amour propre »

Débarquent alors sur le plateau cinq femmes nues si l’on excepte leurs bottines, genouillères et perruques rousses, flingues à la main, sortes de Claudettes sorties d’un film de Tarantino, qui défilent et tirent dans tous les sens, sans oublier de viser le public. Elles seront bientôt rejointes par le seul homme de l’équipe, un Nijinski petit et rond, qui comme elles rendra compte sans fard de son histoire. Dans ces témoignages poignants, il sera question de pensées suicidaires, de troubles alimentaires, de nymphomanie, de traitement au lithium, de Marylin Monroe, Lady Di et Elton John, de l’internement du Dieu des danseurs, auteur de Petrouchka revenu parmi nous. La danse, très présente dans ces récits, vient les entrecouper en multipliant les envols qui se fracassent en chutes, les gestes de combats entre Drôles de Dames et Tomb Raider, les tirs, toujours. Le rire – irrésistible pas-de-deux sur pointes – et la candeur – un ange sur patin à roulettes – offrent régulièrement un pendant apaisant à cette violence débridée. Après Fuck me et Love me, Marina Otero, poursuivant son projet d’une œuvre sans fin basée sur sa propre vie, clôt en beauté son triptyque avec Kill me. Au-delà de sa propre expérience, elle donne à entendre avec crudité et fantaisie des voix peu présentes habituellement sur les plateaux, continuant de tracer son chemin singulier dans le paysage chorégraphique.

 

Delphine Baffour

A propos de l'événement

Kill me
du mercredi 25 septembre 2024 au dimanche 29 septembre 2024
Théâtre du Rond-Point
2 bis av. Franklin D. Roosevelt, 75008 Paris

Du 25 au 27 septembre à 21h, le 28 à 20h, le 29 à 17h.

Tél. : 01 44 95 98 00. Durée : 1h30.

Vu à la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon dans le cadre du Printemps des Comédiens. À voir aussi au Théâtre du Rond-Point : Fuck me du 18 au 22 septembre, Love me le 24 septembre

Également du 30 octobre au 2 novembre au Théâtre de Vidy, Lausanne, Suisse, le 5 novembre à L’Onde, Vélizy, du 26 au 29 mars au Théâtre des Célestins, Lyon.

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