L’Enfant et la rivière
Adaptatrice et interprète du roman d’Henri [...]
Avignon / 2016 - Entretien / Ladislas Chollat
Ladislas Chollat met en scène Kennedy de l’auteur belge Thierry Debroux. Une incursion derrière le mythe.
Pour vous, que représente J.F.K et, plus globalement, la famille Kennedy ?
Ladislas Chollat : Je suis né en 1975, douze ans après son assassinat. La représentation que j’avais de J.F.K., jusqu’à aujourd’hui, était assez classique. Je gardais en mémoire l’image d’un président jeune, au charme ravageur, qui avait mené une vraie politique sociale dans son pays, notamment en permettant aux Noirs d’être traités à égalité avec les Blancs. Ce qui correspondait à l’image que son épouse, son clan et lui-même, ont voulu laisser : celle d’un président modèle, partageant sa vie avec une femme modèle.
Ce n’est donc pas l’image que relaie Thierry Debroux…
L. C. : Non. Il casse complètement cette image de catalogue. Il peint des monstres assoiffés de pouvoir, incapables de dire leurs émotions… La figure du père est très présente dans la pièce. Il apparaît comme un homme uniquement intéressé par le pouvoir. Il se sert de ses enfants pour accomplir le destin qu’il n’a pas su se donner. La mère, Rose, est absente. Trop absente. J.F.K. (ndlr, interprété par Alain Leempoel) et Bobby (ndlr, Dominique Rongvaux) s’accrochent. Le second rêve au destin du premier. Bobby est fasciné par son frère, qui est le « bad boy » qu’il ne sera jamais.
Finalement, quel portrait de J.F.K. cette pièce brosse-t-elle ?
L. C. : Ici, J.F.K. est un homme fatigué, malade, prisonnier de ses addictions… Un être suicidaire qui préfère courir vers sa destinée fatale plutôt que de finir de gouverner en fauteuil roulant. Mais, paradoxalement, ce portrait n’est pas négatif. En apparaissant plus faible, il devient plus humain. Et on s’attache à lui.
Quelle orientation donnez-vous à ce texte ?
L. C. : Kennedy n’est pas une pièce réaliste, mais un rêve. Ou plutôt un cauchemar. Très vite, le surnaturel prend sa place à travers une figure féminine, interprétée par Anouchka Vingtier. Ces apparitions permettent au spectacle de sortir du documentaire. Car la reproduction du réel ne m’a jamais intéressé. Les vidéos viennent ici suggérer la réalité, plus qu’elles ne l’expliquent. Je n’ai pas cherché à copier, mais à réinventer un personnage en fonction des éléments donnés par le texte. Et donc à montrer, derrière le président, l’homme face à ses angoisses, face à ses peurs d’enfant. Un homme qui se demande s’il n’est pas passé à côté de sa vie.
Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat
à 15h. Relâches les 11, 18 et 25. Tél. : 04 90 86 74 87.
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