Só20
L’homme fête ses cinquante ans, le danseur [...]
Avignon / 2016 - Entretien / Ayouba Ali
Dans le cadre de La belle Scène Saint-Denis installée à La Parenthèse, Ayouba Ali et Astrid Bayiha présentent un texte ardent du dramaturge franco-ivoirien Koffi Kwahulé : du viol et de la résilience.
« Jaz est un monologue en forme de long poème : c’est la parole d’une femme dont on ne sait pas trop qui elle est. On sent d’emblée qu’il lui est arrivé quelque chose de grave et on comprend que c’est un viol. Avec Astrid Bayiha, nous y avons lu une parole de résilience. Koffi Kwahulé est un auteur franco-ivoirien vivant, dont l’œuvre est très influencée par la musique, et notamment le jazz. Quand on lit ce texte, on a l’impression d’une scansion très particulière : l’écriture, versifiée, est un peu sur le fil, pas forcément syntaxiquement conforme à l’oral. Quand on l’entend, on a la sensation d’une mémoire et d’une pensée saccadées, qui cherchent à se reconstruire. On a l’impression que cette femme parle à deux moments distincts : juste après l’agression, et longtemps après. C’est pourquoi j’ai fait appel à deux comédiennes pour interpréter ces deux instants différents de la vie du personnage : Astrid Bayiha, qui est à l’origine du projet, et Caroline Rabaliatti.
Equilibre entre pudeur et dénonciation
Les comédiennes mêlent la parole et le chant a cappella : cela fait naître ce chant de l’âme, pas forcément en accord avec la parole dite, comme quand on essaie de dire trop de choses ou qu’elles remontent malgré soi. Prendre ce texte en charge n’est pas chose aisée : il y a un équilibre à trouver entre la pudeur et la volonté de ne rien éluder. J’ai voulu aller au cœur des choses, être au plus près de ce que le texte raconte, mais en choisissant l’allégorie plutôt que la manière frontale. On ne sait pas à qui cette femme s’adresse : j’ai donc essayé une adresse directe au public qui conserve une forme d’ambiguïté, pour mettre les spectateurs en position de témoins. Je n’ai pas envie de choquer les gens, mais je n’ai pas envie non plus qu’ils détournent le regard : cette violence faite aux femmes existe, elle est là, il faut la voir. »
Propos recueillis par Catherine Robert
à 19h. Tél. : 04 90 87 46 81.
L’homme fête ses cinquante ans, le danseur [...]