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Théâtre - Critique

Jacques Osinski présente Fin de partie de Beckett au Théâtre de l’Atelier

Jacques Osinski présente Fin de partie de Beckett au Théâtre de l’Atelier - Critique sortie Théâtre Paris THEATRE DE L'ATELIER
Frédéric Leidgens et Denis Lavant dans Fin de partie. © Pierre Grosbois

Théâtre de l’Atelier / texte Samuel Beckett / mise en scène Jacques Osinski

Publié le 17 décembre 2022 - N° 306

Sa vision de La dernière bande, en 2019, nous avait captivés. Le metteur en scène Jacques Osinski revient aujourd’hui à l’œuvre de Samuel Beckett avec Fin de partie. Une création présentée au Théâtre de l’Atelier qui permet de retrouver, dans le rôle de Clov, un Denis Lavant au sommet de son art.

C’est au mois de juillet dernier, à l’occasion du Festival Off Avignon 2022, que le fondateur de la Compagnie L’Aurore boréale, Jacques Osinski, a créé Fin de partie au Théâtre des Halles. Après plusieurs monologues de Samuel Beckett avec Denis Lavant (Cap au pire en 2017, La dernière bande en 2019, L’Image en 2021), le metteur en scène s’empare à présent, accompagné du même comédien, de l’une des plus grandes pièces de l’écrivain d’origine irlandaise. Une pièce en forme de huis clos ontologique, traversée de souffles burlesques, d’accents pathétiques et de bouffées de mélancolie. Comme l’ensemble du théâtre de Beckett, Fin de partie (texte publié en 1957, aux Editions de Minuit) est une œuvre exigeante, vertigineuse, qui s’attache à explorer avec une savoureuse espièglerie les limites de ce qui est et ce qui n’est pas. Entre bouffonnerie et métaphysique, Clov (Denis Lavant), Hamm (Frédéric Leidgens), Nell (Claudine Delvaux) et Nagg (Peter Bonke), nous placent au bord du précipice de l’existence. Les quatre personnages insolites, comme confinés dans un quotidien aux réalités absurdes, sinon problématiques, proposent l’expérience pleine et entière du langage, de la vacuité, de la fatalité, de la vie.

Une performance d’acteur unique

Mais ici, cette expérience s’offre à nous de manière imparfaite. Car la distribution réunie par Jacques Osinski ne permet pas à tous les personnages de se déployer comme ils le devraient. Au-delà de ce déséquilibre, cette proposition dispose d’un atout majeur : la performance d’acteur de Denis Lavant dans le rôle de Clov. Voir un interprète ainsi approfondir la complexité humaine de son personnage, à travers une telle inventivité, une telle virtuosité, une telle amplitude de la parole et du corps, est un privilège rare. À l’instar du travail qu’ils avaient réalisé ensemble pour La dernière bande, le comédien et son metteur en scène jouent ici de facéties, de lenteurs, de silences qui se prolongent. Ils se rapprochent à de nombreuses reprises de l’art du clown. On sait tout le bien que Samuel Beckett pensait de Buster Keaton (pour qui l’auteur a écrit le scénario de Film, court-métrage réalisé par Alan Schneider en 1965). Il y a quelque chose du génie de l’acteur-réalisateur américain dans le Clov que fait vivre, aujourd’hui, Denis Lavant. On est saisis par la drôlerie et l’étrangeté de cet être aux éclats de lucidité bouleversants. Tel un fildefériste, il se lance au-dessus du vide avec une prodigieuse aisance. Une telle traversée ne se manque pas.
 
Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

Fin de partie
du jeudi 19 janvier 2023 au dimanche 5 mars 2023
THEATRE DE L'ATELIER
1 place Charles-Dullin, 75018 Paris

Du mardi au samedi à 19h, le dimanche à 15h. Relâche les lundis et le mardi 24 janvier. Durée de la représentation : 2h10. Spectacle vu au Théâtre des Halles – Scène d’Avignon, le 14 juillet 2022. Tél. : 01 46 06 49 24. www.theatre-atelier.com

Egalement les 12 et 13 avril 2023 au Théâtre Liberté à Toulon.

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