Simon Falguières questionne l’essence de la création avec Les Etoiles
Guidé par l’interrogation d’Hölderlin : « A [...]
Après Tristesses et Arctique, Anne-Cécile Vandalem a achevé sa trilogie sur l’impossibilité d’une vie humaine commune avec Kingdom, où se joue un conflit familial en pleine taïga sibérienne. La pièce mêle théâtre et vidéo, récit et incarnation, entre réalisme et étrangeté. Sans véritablement nous embarquer dans l’histoire.
Dans le sillage de Tristesses, polar nordique explorant la montée des populismes sur une île, puis d’Arctique, huis clos sur un paquebot à la dérive dans un environnement glacé, Kingdom achève la trilogie de l’autrice et metteure en scène par un conflit familial dans la taïga sibérienne. À sa manière singulière, chaque pièce éclaire les difficultés et les échecs du vivre ensemble, qui mènent au désastre. Librement inspiré du film documentaire Braguino de Clément Cogitore, parti à la rencontre d’une famille vivant en autarcie au fin fond de la taïga, ce dernier volet met en scène l’effondrement d’une utopie et la persistance d’affrontements ancestraux. Dans le documentaire, il existe en effet une autre famille, jamais filmée, qui a rejoint la première et s’est installée à proximité, avant qu’un conflit ne les déchire. Dans la pièce, cette autre famille demeure un ennemi invisible, sur laquelle projeter nombre d’hypothèses, de peurs ou fantasmes. Animé par une composition sonore de Vincent Cahay et Pierre Kissling, l’espace de vie avec cabane, bouleaux et rivière est bordé à cour par une palissade que nul n’est supposé franchir. De l’autre côté vivent ceux qui ont choisi de pactiser avec les braconniers, symptôme d’un capitalisme avide . « Les voisins, ils tirent sur tout ce qui bouge, ils n’ont pas de limite. La taïga ne le supporte pas » confie le patriarche et grand-père fondateur Philippe.
Quel futur ?
Son fils et son épouse, leurs quatre enfants, un neveu et une nièce habitent ce lieu isolé en pleine nature dans le respect du vivant malgré des conditions difficiles. La distribution est à l’unisson, les quatre enfants sont impeccables de même que les adultes. En toute logique, la nature n’est pas ici le royaume d’une utopie harmonieuse. Les dangers de la forêt mais aussi les douleurs héritées du passé rendent la vie précaire. Il est évident que les questions soulevées par la pièce sont aiguës : celle des relations intergénérationnelles et des héritages, celle du rapport à la nature, celle d’un futur assombri, alors que les enfants ont théoriquement droit au soin et à l’attention. Comme dans les précédents opus, le théâtre et la vidéo se mêlent : une équipe de cinéma avec cameraman sur scène effectue un reportage sur cette famille singulière de « Vieux-Croyants » qui rappelle par certains points la communauté amish. La caméra, qui notamment recueille la parole, filme les visages ou la nature et montre l’intérieur de la maison, acte une forme de mise à distance du jeu incarné. L’image revendicatrice accorde la primauté au témoignage, se fait révélatrice de ce qui n’est pas dit. Mais le mélange des genres tend ici à affaiblir la puissance d’évocation du théâtre, à diluer l’intensité de la présence des comédiens. La fin de l’histoire quant à elle interroge le futur…
Agnès Santi
du mardi au samedi à 20h ; dimanche à 15h ; relâche lundi. Tél. : 01 44 85 40 40. Durée : 1h40. Spectacle vu au Festival d’Avignon 2021.
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