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Théâtre - Critique

Iphigénie de Jean Racine, mise en scène de Stéphane Braunschweig

Iphigénie de Jean Racine, mise en scène de Stéphane Braunschweig - Critique sortie Théâtre Paris Odéon-Théâtre de l’Europe - Ateliers Berthier
Iphigénie, de Racine, dans une mise en scène de Stéphane Braunschweig. Crédit : Simon Gosselin

de Jean Racine / mes Stéphane Braunschweig

Publié le 2 octobre 2020 - N° 287

Pour sa nouvelle mise en scène, le directeur du Théâtre national de l’Odéon présente Iphigénie aux Ateliers Berthier. Un spectacle à l’esthétique résolument contemporaine qui ne fait naître, qu’en partie, les saisissements de la tragédie de Racine.

L’idée de Stéphane Braunschweig est née au printemps dernier, au moment du confinement. A l’heure où notre monde a brutalement stoppé sa course effrénée à la croissance et la consommation. Une idée et une vision judicieuses : tracer un parallèle entre cette situation inédite dans l’histoire contemporaine et l’immobilité à laquelle se voient contraints, dans Iphigénie, les chefs de guerre grecs. Privés d’un vent qu’ils attendent pour prendre la mer et soumettre Troie, Agamemnon, Ulysse et leurs alliés sont bloqués dans le port d’Aulis. Ils s’en remettent à l’oracle Calchas afin de connaître la volonté des dieux. Cette dernière retentit comme un coup de tonnerre. L’armada ne pourra s’élancer dans son expédition martiale qu’après la mort d’Iphigénie, qui devra être immolée sur l’autel d’Artémis. Se résignant à perdre sa fille pour assurer ses intérêts politiques et économiques, Agamemnon organise le sacrifice, se jouant pour cela de Clytemnestre, son épouse, et d’Achille, le fiancé d’Iphigénie. Aux Ateliers Berthier, Stéphane Braunschweig raconte cette histoire en immergeant les figures mythologiques de la tragédie de Racine au sein de notre époque.

Turbulences émotionnelles

Costumes d’une élégance toute contemporaine, dispositif bifrontal excluant décors et accessoires (hormis la présence sur scène de deux chaises, d’une fontaine à eau, d’une large porte en verre, et la projection face à chaque gradin de spectateurs d’une vidéo de mer d’huile signée Maïa Fastinger). Cette version transposée d’Iphigénie arbore un dépouillement radical. Au sein de cet espace, les dix rôles du spectacle sont interprétés, selon les jours, par un double groupe d’acteurs travaillant à faire surgir les passions et les turbulences émotionnelles qui nourrissent la pièce. Dédiée à la puissance des sentiments et à la beauté des alexandrins, la représentation conçue par le directeur du Théâtre national de l’Odéon était servie, au soir du 24 septembre, par trois magnifiques comédiennes : Virginie Colemyn (Clytemnestre), Lamya Regragui Muzio (Eriphile – prisonnière étrangère, enlevée par Achille, qui sera sacrifiée à la place d’Iphigénie) et Astrid Bayiha (Doris – confidente d’Eriphile). Leurs partenaires de jeu, disons-le, ne nous ont pas fait voyager dans les troubles et les emportements de leurs personnages avec autant de grâce. Lestées par ce déséquilibre, la force et la grandeur de la poésie racinienne ne se déployaient, ce soir-là, qu’à travers une alternance de hauts et de bas.

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

Iphigénie de Jean Racine, mise en scène de Stéphane Braunschweig
du mercredi 23 septembre 2020 au samedi 14 novembre 2020
Odéon-Théâtre de l’Europe - Ateliers Berthier
1 rue André-Suarès, 75017 Paris

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h. Relâches le 27 septembre, les 11, 25 et 31 octobre et le 1er novembre. Durée de la représentation : 2h15. Tél. : 01 44 85 40 40. www.theatre-odeon.eu

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