Genoma B d’après Federico Garcia Lorca, mis en scène par Juan Antonio Moreno et Angeles Vazquez

En 2001, le jongleur/acteur Antonio Moreno, formé à l’École nationale du cirque de Montréal, et la danseuse Angeles Brea, formée au Centre des arts flamencas de Madrid, créent la compagnie Al Badulake. Dans le sillage des dramaturgies nouvelles, la compagnie espagnole propose des spectacles marqués par la transversalité, ses deux directeurs ayant ressenti un besoin d’expression qu’ils souhaitent développer dans une « vision plus large du spectacle, sans textes et dynamique, où le mouvement, la musique et le jeu constituent les enjeux principaux ». C’est ainsi qu’ils convoquent souvent le flamenco, la danse, le cirque et le théâtre. Tel était le cas de leur premier spectacle, Malaje, présenté en 2001 aux festivals d’Aurillac et de Mont-de-Marsan, et accueilli avec succès. Pour leur première fois à Avignon, leur nouvelle création s’inspire librement de La Maison de Bernarda Alba de Federico Garcia Lorca. De cette pièce où l’héroïne éponyme, veuve de son second mari, impose à ses cinq filles un deuil de huit ans dans un isolement total, selon la tradition andalouse, la compagnie Al Badulake a enlevé quasiment tout le texte (sauf une phrase de chaque sœur, qui dessine son caractère), mais a conservé l’univers et l’esprit lorquiens.

Lorca, poète de la liberté

Pour Antono Moreno, Lorca est « le poète de la liberté, un poète universel, toujours en lutte pour une société libre et égale. La Maison de Bernarda Alba nous donne beaucoup d’outils pour développer les thèmes dont nous voulions parler : la liberté, l’oppression, les espoirs de l’amour, les préjugés dans notre société, tout cela sous forme de métaphore. Nous avons suivi la ligne de la pièce et même si le texte a presque totalement disparu, il s’est exporté dans les images ». Qu’elle se développe sous forme de théâtre, de cirque et de flamenco, l’expression corporelle donne vie à une adaptation très personnelle de la pièce de Lorca. Sur scène, les cinq sœurs interprétées par Sandra Carrasco (jonglage, hula-hoop), Noemi Martinez (flamenco et performance), Vivian Friedrich (roue Cyr, corde lisse et danse), Ana Esteban (équilibre, danse et voix), Irene Acereda (percussion flamenco, danse flamenco et voix) créent un monde plein d’émotions, d’expériences, de souffrances et de joies. Intitulé Genoma B., cette nouvelle création de la compagnie espagnole fait référence à la carte génétique qui se transmet d’une génération à une autre : comportements, attitudes, esprit politique. Avec un B comme Bernarda.

Isabelle Stibbe