Ambition contre résignation
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Avignon / 2015 - Entretien Samuel Achache
Après le succès amplement mérité de l’excellent Crocodile trompeur qu’il avait co-mis en scène avec Jeanne Candel, Samuel Achache poursuit dans une forme originale de théâtre musical avec Fugue.
Cette création relève-t-elle encore de ce qu’on pourrait appeler un théâtre musical de plateau ?
Samuel Achache : je me méfie des appellations, mais celle-ci raconte assez bien ce qu’on tente de faire, encore plus qu’avec le Crocodile trompeur où l’on s’appuyait sur l’œuvre déjà écrite de l’opéra de Purcell, Didon et Enée. En fait, plus que du théâtre musical de plateau, on se dit qu’on va faire de l’opéra avec les moyens du théâtre. A la différence qu’à l’opéra, la musique est conductrice de l’action, alors que ce qui nous intéresse c’est de voir comment l’une et l’autre peuvent avancer ensemble.
Comment cela se traduit-il dans votre travail ?
S.A. : A partir du moment où la musique n’est pas dans la fosse, on se dit qu’on peut tous tout faire. Au plateau, un musicien peut donc faire une proposition théâtrale et vice-versa. L’idée n’est pas d’être des singes savants multifonctions mais de partir de ce que les gens savent faire. Et puis notre truc, c’est aussi de s’amuser.
A partir de quoi se construit Fugue ?
S.A. : Je suis arrivé aux répétitions avec la question du tempérament. C’est un concept important dans la musique. Par exemple, dans la musique ancienne, selon le tempérament d’une composition, les musiciens accordaient leur instrument différemment. Cela donnait une tonalité, une couleur, un sentiment différent à la musique. Mais depuis la fin du 19ème siècle, tous les tempéraments sont égaux. Nous avons approfondi ce sujet, et tenté de voir ce que cela pouvait évoquer dans nos imaginaires. Sans être abordée directement, cette question planera sur le spectacle. Il évoque aussi la disparition, ce qui manque, et une idée de la pureté et de son absurdité. Parmi nos sources d’inspiration, nous avons eu par exemple Rencontres au bout du monde, un documentaire de Werner Herzog tourné en Antarctique.
Vous procédez par dérives successives, un peu en fuite comme dans une fugue ?
S.A. : Au départ, on s’était dit qu’on chercherait à emprunter la structure de composition de la fugue comme modèle pour la dramaturgie. Par exemple, on se demandait comment écrire en contrepoint quand une chose forte se passe sur scène. Mais, au fur et à mesure du travail, c’est devenu fluctuant, comme pour les tempéraments.
Propos recueillis par Eric Demey
A 22h, relâche le 19. Festival d'Avignon. Tél : 04 90 14 14 14.
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