Penser la forme du concert
Le chef et compositeur, fondateur de l’Ensemble TM+, continue de revendiquer une programmation libre et intelligente, mettant en relation la création contemporaine et le répertoire.
« Le but est bien d’inscrire la musique d’aujourd’hui dans la société »
Comment définiriez-vous la « philosophie » de TM+ ?
Laurent Cuniot : La ligne de force de la programmation, ce sont les liens entre la création contemporaine et ce qui l’a précédée. On ne peut pas, à mon avis, dissocier la question de la diffusion de la musique contemporaine et celle du répertoire classique : les deux doivent se nourrir et s’enrichir. Cependant, je refuse toute démarche systématique. Je continue à défendre la forme du concert comme la meilleure manière de faire entendre et découvrir la musique, à condition d’avoir une réflexion sur le concert, que l’on peut considérer comme une forme musicale en soi. Chaque programme de TM+ est envisagé de cette manière, un peu comme je le fais en tant que compositeur, pour chacune de mes œuvres.
Quel est le point de départ de la construction d’un programme ?
L.C. : Ce peut être une œuvre nouvelle, ce peut être l’envie de mettre en lumière une partie du répertoire… Cette année par exemple, notre programme « Pierrot multiple » tend à rapprocher les Pierrots lunaires composés au même moment par Schoenberg et Max Kowalski – dans des styles sensiblement différents – et à porter sur elles un regard d’aujourd’hui.
Vous entretenez avec certains compositeurs une longue relation de fidélité…
L.C. : Pour les interprètes, cette transmission orale, directe, cette familiarité sont essentielles. Pour le compositeur, l’intimité avec des interprètes qui connaissent ses attentes, qui sont familiers de son univers sonore, est aussi très importante : souvent les compositeurs aiment savoir pour qui ils écrivent. Cependant, il faut également rester toujours à l’affût des nouveaux talents, ce que nous faisons en particulier dans le cadre de « What’s new », un partenariat avec les classes de composition du Conservatoire de Nanterre et, ces trois dernières années, du Conservatoire royal de Copenhague.
Constatez-vous un renouvellement du public ?
L.C. : La durée et le suivi de la « résidence » de TM+ à Nanterre ont permis de créer une forte identité du projet artistique de TM+ auprès de son public. Bien sûr, il faut essayer de faire mieux, de sorte que le public que nous rencontrons dans les quartiers nous suive dans la salle. Le but est bien d’inscrire la musique d’aujourd’hui dans la société.
Propos recueillis par Jean-Guillaume Lebrun