La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -268-Théâtre de Sartrouville et des Yvelines

La Vie devant soi

La Vie devant soi - Critique sortie Théâtre Sartrouville Théâtre de Sartrouville et des Yvelines - Centre Dramatique National.
Le metteur en scène Simon Delattre. Crédit : Marina Hoisnard

D’après Romain Gary (Emile Ajar) / mes Simon Delattre

Entretien / Simon Delattre

Publié le 27 août 2018 - N° 268

Entre théâtre, marionnettes et musique, Simon Delattre adapte le roman de Romain Gary et l’histoire de Momo, qui choisit lui-même sa famille de cœur pour ne pas vivre sans amour.

 « Est-ce qu’on peut vivre sans amour ? »

Pourquoi choisir d’adapter ce roman ?

Simon Delattre : Je sortais d’une écriture de plateau et je voulais me tourner vers un récit fort et solide. Ce roman a joué un rôle important dans ma vie de lecteur adolescent. Devenu adulte, il a toujours eu le même effet sur moi : une immense émotion. C’est un roman qui traverse les âges, actuel, et, mieux encore, universel. Momo incarne la figure du poète, de l’artiste. Son histoire montre comment s’ouvrir à l’art, à la poésie et à la philosophie peut émanciper d’une condition sociale initiale. Cette idée constitue le métadiscours du roman et de la mise en scène. J’adore cet enfant de quatorze ans entouré d’adultes qui leur fait dire des choses puissantes et belles. Et j’adore Madame Rosa, cette ancienne prostituée et déportée qui garde les enfants des autres prostituées parties faire le trottoir !

Comment l’adaptez-vous ?

S. D. : Je ne voulais pas faire jouer un enfant. Comme Momo parle au passé, j’ai placé l’adaptation de son point de vue d’adulte. Sa parole convoque des situations et on passe de la narration à l’incarnation. La scénographie représente une cage d’escalier qui monte jusqu’à un appartement, tout petit pour que la grosse Madame Rosa y semble encore plus grosse ! Momo est comme le chef d’orchestre de la représentation. Plus on avance, moins la narration est convoquée, au bénéfice de l’incarnation. Adapter ce roman est un peu angoissant car beaucoup de gens l’aiment et ont déjà une relation avec lui, souvent passionnelle. Il m’a fallu faire des choix, trouver l’essence de ce matériau original et je crois qu’elle tient à cette question majeure : est-ce qu’on peut vivre sans amour ? Traverser ce spectacle, c’est tâcher de répondre à cette question.

Quelle est la leçon de vie de ce spectacle ?

S. D. : Ce qui me touche beaucoup c’est la grande tension dramatique entre la violence sociale et la manière dont elle est vécue par Momo. Il fait de l’aïkido avec ses émotions, accompagnant leur mouvement pour mieux les maîtriser. Le décalage entre ce qu’on sait et ce qui en est dit est un ressort de jeu très puissant. Tigran Mekhitarian, Momo, tient le plateau. Avec lui, Maya Le Fourn, Madame Rosa, et le marionnettiste Nicolas Goussef. La musicienne Nabila Mekkid incarne le monde de la prostitution de manière musicale. Elle chante en français, en anglais et en arabe : je trouve important que l’on entende cette langue. La solidarité intercommunautaire du Belleville des années 70 interroge notre l’actualité. C’est un théâtre sociologique plutôt que politique ; pas un spectacle partisan. Reste que celui qui nous parle raconte quelle place on a donné en France à ces communautés venues d’ailleurs.

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

La Vie devant soi
du mercredi 16 janvier 2019 au vendredi 18 janvier 2019
Théâtre de Sartrouville et des Yvelines - Centre Dramatique National.
Place Jacques Brel, 78500 Sartrouville.

Création du 6 au 10 novembre 2018 au Théâtre Jean-Arp de Clamart et les 6 et 7 décembre au Trident, scène nationale de Cherbourg.

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