La Criée accueille trois spectacles programmés par son nouveau directeur, Robin Renucci : La Tendresse, Phèdre et Oblomov

Continuant son travail avec les auteurs Alice Zeniter et Kevin Keiss, Julie Berès est allée à la rencontre de jeunes hommes, les questionnant sur leurs rapports à la virilité, sur ce qu’ils font des clichés, des injonctions sociales et de l’héritage du patriarcat. Dans l’adresse directe au public d’un théâtre performatif, des comédiens originaires de différents horizons artistiques, géographiques et sociaux explorent l’impensé de la masculinité. Le texte est comme une partition musicale et les interprètes forment un chœur, dont émergent tour à tour des solistes. L’ensemble compose un spectacle éblouissant de fantaisie et d’énergie. Autre figure de la masculinité, celle d’Oblomov, qui fait le désespoir de ses amis et la risée de ses détracteurs tant sa passivité contemplative tourne à l’aboulie. Jusqu’à ce que le regard d’une femme, qui voit en lui ce qu’il a enfoui sous des décennies d’habitudes molles, parvienne à le changer.

Amour, toujours…

Grâce à l’amour, la vie d’Oblomov redevient un kaléidoscope digne d’être exploré. Mais comme l’amour s’use plus vite que le monde ne change, la procrastination reprend le dessus… Si Robin Renucci choisit l’adaptation que signe Nicolas Kerszenbaum du roman d’Ivan Gontcharov, il retrouve le théâtre classique avec Racine, pour une version de Phèdre qui clôt son exploration du verbe du Grand Siècle commencée avec Britannicus, Bérénice et Andromaque. Phèdre se veut maîtresse là où elle devrait être mère. Hippolyte aime la sœur des ennemis de son père. Thésée, défaillant et absent, est trop loin de la cour où il devrait régner… « Au cœur de cette tragédie se joue un combat entre ombre et lumière, entre désir et raison, dicté par la violence des fantasmes qui animent Phèdre, la plus touchante, la plus mémorable victime de l’amour », dit Robin Renucci qui fait briller la langue, comme dans un écrin, sur un plateau nu.

Catherine Robert