Jean Bellorini reprend « Le Suicidé » de Nicolaï Erdman, avec la troupe du Berliner Ensemble

« Pour mener à bien cette recréation, j’ai dû oublier les idées que j’avais eu, en 2016, au sujet du texte d’Erdman. Le Suicidé résonne de façon particulière aujourd’hui, notamment si l’on pense à notre nécessité de donner du sens à nos existences, dans le monde qui est le nôtre. Sémione Séminovitch, le personnage principal de la pièce, nous dit que l’on n’est jamais aussi vivant que lorsqu’on se rapproche de la mort. Car face à l’éventualité de son suicide, il se sent tout à coup exister. Ce texte, qui est très drôle, très vif, est en même temps profondément métaphysique. Il est très excitant pour moi d’avoir la possibilité de l’explorer une nouvelle fois.

Une drôlerie métaphysique

J’ai dû trouver un équilibre subtil entre l’oubli total de ce que je savais et l’envie de revisiter, de nuancer, de faire vivre autrement les personnages du Suicidé. En 2016, j’avais à l’esprit les attentats de 2015. La question de la perte de sens se situait pour moi à cet endroit-là. Aujourd’hui, j’envisage cette question de manière plus quotidienne. Je souhaite aller encore plus loin dans la recherche musicale et la vivacité. Tout peut être chanté sur scène à tout moment. Au théâtre, la musique et le chant soulèvent le cœur des acteurs et des spectateurs en les fédérant, en les amenant à une communion sensible. »

Propos recueillis par Manuel Piolat Soleymat