Du dialogue au mélange
Chorégraphe et artiste associé au Théâtre de [...]
Artiste associée au Théâtre de l’Agora, Chloé Moglia invente un nouveau rapport avec le public qui nourrit sa pratique et féconde sa créativité.
« Entretenir un rapport avec le public autre que l’habituel rapport entre spectateurs et artistes. »
Comment votre installation à Evry a-t-elle eu lieu ?
Chloé Moglia : Il y a plusieurs années, j’avais créé Rhizikon, un spectacle pour adolescents destiné à être joué hors les murs des théâtres et qui ouvrait à une rencontre avec les gens. Christophe avait repéré mon désir d’entretenir un rapport avec le public autre que l’habituel rapport entre spectateurs et artistes. Le théâtre est souvent un endroit où il faut être sage et pertinent. Ce n’est pas un lieu facile à pénétrer quand on n’y est pas véritablement invité. J’ai l’habitude de comparer les spectacles à l’invitation à partager un repas. Il n’y a rien à comprendre, il y a juste à goûter. Lors d’un repas, on ne calcule pas le nombre de calories avalées, le plaisir pris est purement sensitif. Christophe a été sensible à cette idée, et je savais qu’il était de ceux qui pouvaient l’accompagner. J’ai donc proposé La Journée de la chouette, pour les enfants. S’il y a un théâtre à Evry, à quoi sert-il si on n’y invite pas les enfants d’Evry ? Pour cela, il faut réinventer ce que peut être un théâtre. Un théâtre est un endroit où on joue. Jouer, ce n’est pas faire n’importe quoi, c’est travailler à être au monde dans une interaction continuelle : tel est le boulot des enfants. Il faut donc inventer un théâtre que les enfants explorent en s’appartenant à eux-mêmes.
Comment cela se passe-t-il ?
C. M. : On joue le spectacle un soir, les enfants y sont invités et on laisse tout en place. Le lendemain, on les invite à venir jouer dans notre aire de jeu. Un enfant qui joue, c’est un enfant qui travaille. Le jeu est une étude. Comme dans n’importe quel jeu, il y a des règles : on laisse une grande liberté d’exploration, mais on l’accompagne. Cela dit, un môme qui explore ne fait jamais n’importe quoi. Moi qui travaille la position suspendue au dessus du vide, je joue, comme les enfants : tomber, ne pas tomber, être en rapport avec l’autre, mesurer l’effort, mesurer la confiance. Le pari était de voir comment une classe d’enfants embarque dans une situation comme celle-là. Sans récré, sans une seule pause, ils ne nous ont pas lâchés de la journée et ont tout exploré ! Dans mes spectacles, je cherche à partager l’espace avec le public : le but est que le spectacle ne soit pas seulement le lieu où quelqu’un regarde quelqu’un qui se fait regarder. Il s’agit d’être ensemble sur un temps de partage, pendant lequel l’artiste écoute le public. Je crois que s’il fallait résumer le travail de l’Agora, il est de cet ordre-là…
dans le cadre de l’ouverture de saison.
Focus réalisé par Catherine Robert
Tél. : 01 60 91 65 65.
Site : www.theatreagora.com
Chorégraphe et artiste associé au Théâtre de [...]